Bahija Jallal, sauver des vies comme vocation
Il y en a des femmes qui sont nées pour leader. Et Bahija Jallal en fait partie. A neuf ans déjà, alors que ses camarades ne se sont pas encore défaites de leurs poupées, la petite Bahija a déjà trouvé sa vocation. A la mort de son père, " à cause d'une erreur médicale", l'enfant a vu sa curiosité décupler pour tout ce qui a trait à la science. Un déclic qui mènera loin cette native de Casablanca.
Un parcours exceptionnel
Du Maroc, à la France puis aux Etats Unis en passant par l'Allemagne, cette passionnée de science roulera bien sa bosse en affutant ses armes contre la deuxième cause de mort dans le monde, le cancer. " Ma passion pour la science a commencé à un jeune âge. Et j’essaie chaque jour, avec mes équipes, de repousser les limites de la science pour aider le plus de patients ", déclare-t-elle à la MAP. Un manifesto qui résume la profonde motivation de cette marocaine qui, du haut de ses soixante trois ans, peut se targuer d'être l'une des scientifiques les plus en vue dans le monde actuellement.
Mais avant d'en arriver là, la jeune Bahija a du faire du chemin, un parcours à la fois épineux et remarquable. Après un baccalauréat au lycée Chawki à Casablanca, il fait un passage à l'université à Rabat. Mais c'est en France qu'elle trouvera sa voie. Elle opte alors pour la recherche biologique à l’Université de Paris VI. Un choix soutenu par sa mère qui est la représentation vivante de la mère marocaine dévouée, toujours au chevet de ses enfants et de leurs ambitions, comme elle la décrit avec beaucoup de gratitude.
Mission de vie
" C’est à Paris que j’ai découvert l’univers de la recherche scientifique et comme presque tout le monde, j’ai aussi dans ma famille des personnes atteintes du cancer, c'était une motivation supplémentaire pour continuer afin d’aider le plus de gens possible ", décrit-t-elle. Avant de traverser l'Atlantique, Jallal fait une escale scientifique en Allemagne, à Munich où elle rejoint l’institut de biochimie Max-Planck. Un passage qui la mènera sur les sentiers de des thérapies ciblées contre le cancer du sein. Une spécialité qui enrichira son parcours qui s'anonce déjà prometteur.
Toujours investie de cette mission "d'aider les patients", elle débarque en Californie où elle nourrit sa passion pour le domaine des biotechnologies. Le vent en poupe et l'ambition plein la tête, la scientifique marocaine ne tardera pas à se faire remarquer. Ses compétences lui ouvriront les portes et sa carrière évoluera au fil des postes occupés dans les différentes entreprises de recherche médicale. Après les laboratoires Sugen et Chiron Corporation, au laboratoire MedImmune, filiale du groupe AstraZeneca, elle atteint le poste de présidente de la compagnie au bout de 13 ans de services et de réalisations.
Innovation
Un poste qui lui permettra par la suite d’initier de thérapies novatrices pour le système immunitaire. « Une véritable révolution en termes de traitement contre le cancer, puisque pour la toute première fois, on découvrait qu’on pouvait véritablement prolonger la vie des gens. Nous avons lancé 5 produits sur le marché, c’était vraiment extraordinaire ! », commente la scientifique.
Très attachée à son Maroc natal, la sexagénaire croit fort au potentiel des étudiants marocains, des filles et des femmes marocaines. Elle ne rate pas les occasions pour exprimer sa gratitude envers son pays natal et sa prédisposition à la traduire en actions. Malgré son agenda chargé de leader sollicité, Bahija Jallal a toujours un moment pour partager sa passion et son savoir avec les jeunes filles intéressées par les disciplines scientifiques. Pour elle, c'est une manière à encourager et à motiver ces futures scientifiques pouir intégrer le domaine de la recherche. " Je veux dire à toutes les Marocaines qu’elles sont capables et que tout est possible ", aime-t-elle à dire.
Secrets de succès
Et ce ne sont pas des mots en l'air, Bahija Jallal est la belle démonstration. Aujourd'hui, en plus de sa carrière scientifique remarquable, elle est membre du Conseil d’administration de l’Université John Hopkins, membre du comité de direction de l’Université du Maryland, directrice générale d’Immunocore, une société leader dans le domaine de la biotechnologie des récepteurs des lymphocytes T. Nullement jalouse de ses secrets de succès, elle les partge ouvertement sur Linked in.
" Quatre leçons pour une carrière de scientifique : 1) N'ayez pas peur d'échouer 2) Rêvez grand 3) N'oubliez jamais, au milieu de toutes les difficultés, de tous les hauts et les bas, la raison pour laquelle nous faisons ce travail, 4) Pour les femmes, cela peut être difficile. Ainsi, ma quatrième leçon s'adresse aux femmes. Trop souvent, nous sommes freinées dans notre élan par notre quête de la perfection et notre besoin constant d'approbation ou de la peur du jugement. Mon conseil ? Restez toujours fidèle à vous-même ! Vivez votre passion et aimez ce que vous faites! " conseille-t-elle aux femmes. A bon entendeur !