Changements climatiques. Comment sauver la rose de Damas marocaine ?


Cependant, la baisse alarmante des nappes phréatiques, exacerbée par une gestion parfois inefficace et inégale des ressources en eau, complique la situation. Cette diminution des ressources hydriques compromet la possibilité d’assurer un approvisionnement constant et suffisant pour les cultures de roses, ce qui affecte directement la production.
Face à cette crise, les agriculteurs doivent aujourd’hui s’adapter à des conditions climatiques de plus en plus imprévisibles, avec des saisons plus courtes et des rendements de plus en plus irréguliers.
La qualité de la rose, autrefois irréprochable, se trouve également mise à mal, car les conditions de stress hydrique affectent la croissance et la fragrance des fleurs. Ainsi, ce qui était jadis une culture florissante et stable se transforme en un défi de plus en plus complexe, menaçant non seulement l’économie locale mais aussi l’héritage culturel lié à cette fleur précieuse.
Un pilier de l’économie locale
Jouant un rôle crucial dans l’économie locale, la rose de Damas offre bien plus qu’un simple produit agricole. Avec une superficie cultivée de plus de 950 hectares, cette fleur précieuse génère une production annuelle d’environ 3 200 tonnes de fleurs fraîches, un chiffre qui a atteint 3 900 tonnes en 2019 grâce à des conditions climatiques particulièrement favorables. Cette production massive nourrit non seulement les marchés nationaux mais soutient également l’essor d’une industrie florale florissante. L’impact économique de la rose de Damas va bien au-delà de la récolte, puisqu’elle génère près de 400 000 journées de travail par an.
Cette activité agricole contribue également à l’exportation de 63 tonnes de produits dérivés, tels que l’huile essentielle et les eaux florales, rapportant chaque année environ 8 millions de dirhams à la région. Un véritable moteur économique, la culture de la rose de Damas soutient l’emploi local et renforce l’indépendance financière des communautés rurales qui dépendent de cette culture traditionnelle.
Chaque année, la région de Kelaat M’Gouna organise la célèbre fête des roses, un événement emblématique qui célèbre le rôle central de cette fleur dans la vie locale. Attirant des milliers de visiteurs, la fête dynamise le tourisme rural, offrant aux visiteurs un aperçu unique de la culture et des traditions de la vallée. Cet événement met en lumière non seulement la beauté de la rose de Damas mais aussi son rôle vital dans l’économie locale, en faisant un véritable symbole de prospérité et de résilience pour la région.
Vers une résilience agricole et environnementale
Afin de protéger ce trésor national et garantir sa pérennité face aux défis posés par les changements climatiques, plusieurs solutions innovantes et durables sont mises en œuvre. Ces initiatives visent à renforcer la résilience des cultures tout en préservant les ressources naturelles cruciales pour leur développement. La modernisation des systèmes d’irrigation est l'une des premières mesures prises.
Le passage à des techniques d’irrigation goutte-à-goutte permet une gestion plus ciblée et efficace de l’eau, réduisant ainsi les pertes par évaporation et minimisant le gaspillage. Ce système optimise l’utilisation des ressources hydriques disponibles, tout en renforçant la résilience des cultures face aux sécheresses de plus en plus fréquentes.
Parallèlement, la revalorisation des pratiques agroécologiques devient essentielle pour maintenir un équilibre avec l’environnement. L’adoption de biofertilisants, de composts organiques et de méthodes agricoles adaptées aux climats arides contribue à préserver la fertilité des sols tout en réduisant leur érosion. Ces pratiques respectueuses de la nature favorisent une agriculture durable, permettant aux cultures de prospérer tout en préservant les écosystèmes locaux.En outre, des efforts considérables sont déployés dans le domaine de la recherche et du développement pour sélectionner des variétés de roses plus résistantes à la sécheresse.
Ces recherches permettent d’identifier des solutions pour améliorer les rendements tout en préservant la qualité des fleurs. L’objectif est de garantir la durabilité de la culture de la rose de Damas, même face à des conditions climatiques de plus en plus instables.Enfin, la gestion participative de l’eau devient un enjeu fondamental. Consciente de l’importance capitale de la gestion des ressources hydriques, la communauté locale, les autorités et les ONG collaborent pour promouvoir une utilisation équitable et durable de l’eau. Parmi les initiatives phares, on trouve la rénovation des canaux traditionnels d’irrigation, appelés seguias.
Ces canaux permettent une distribution plus juste et plus efficace de l’eau, garantissant ainsi un approvisionnement régulier et optimal pour les cultures de roses.Ces solutions collectives et novatrices témoignent de la volonté de la région de s’adapter aux défis du changement climatique tout en préservant l’héritage culturel et économique de la rose de Damas. Grâce à ces efforts conjoints, la région espère non seulement renforcer la résilience de cette fleur emblématique, mais aussi poser les bases d’une agriculture plus durable et respectueuse de l’environnement.