Les scientifiques sont aujourd'hui certains à plus de 90 % que le réchauffement climatique causé par l'Homme accroîtra la durée, la fréquence et l'intensité des phénomènes météorologiques extrêmes comme les vagues de chaleur. C'est ce que révèle un rapport de référence sur le sujet.
Le rapport du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC) relatif aux phénomènes météorologiques extrêmes a révélé qu'il était très probable que le changement climatique soit déjà responsable de graves vagues de chaleur dans des zones comme l'Europe méridionale et méditerranéenne.
D'ici 2100, les coûts financiers de ces conditions extrêmes pourraient s'élever à 15 000 milliards d'euros et concerneraient principalement les pays actuellement en développement.
Les populations les plus touchées seraient alors les femmes, les populations pauvres, les personnes âgées, illettrées, handicapées ou en mauvaise santé.
« Ces informations sont à présent sur la table », a déclaré à EurActiv Thomas Stocker, l'un des principaux auteurs du rapport. « Si les émissions anthropiques de gaz à effet de serre sont élevées, l'incidence de journées de « pics de chaleurs » sera multipliée par dix. »
« Si nous optons pour un programme d'atténuation, ces conditions extrêmes seront tout de même présentes », a-t-il expliqué.
Ce rapport a été rédigé par 220 auteurs issus de 62 pays et il inclut les commentaires de plus de 18 000 experts et gouvernements ajoutés lors de ses trois phases de révision.
« Il s'agit certainement du rapport le plus approfondi jamais rédigé sur les conditions climatiques extrêmes », a déclaré M. Stocker.
Nouveau vocabulaire de l'incertitude
Le rapport a utilisé un « nouveau vocabulaire de l'incertitude » établissant un classement rigoureux de la fiabilité des prévisions en fonction d'une échelle allant de « pratiquement certain » (à 99 à 100 %) à « très peu probable » (de 0 à 1 %).
Lorsque le rapport affirme par exemple qu'il est « probable » que les fortes précipitations se multiplient sur la planète au cours de ce siècle, il s'agit d'une probabilité estimée entre 66 et 90 %, selon les données disponibles.
Pour atteindre ce degré d'exactitude, le rapport a été rédigé selon un modèle de « consensus » qui s'est avéré problématique pour l'évaluation de la corrélation entre le changement climatique lié aux activités humaines et certains phénomènes comme les cyclones tropicaux, sur lesquels peu de données ont été collectées avant 1950.
Certains scientifiques qui ont contribué à ce rapport ont également remis en cause la quantité de précipitations qui mène techniquement à des sécheresses et la meilleure manière d'évaluer ces sécheresses, par le taux d'humidité du sol ou le nombre de jours consécutifs sans précipitations. Ces deux mesures ont finalement été utilisées.
Cette approche rigoureuse vise les décideurs politiques et pourrait constituer une barrière incontestable face aux climatosceptiques qui par le passé ont remis en cause les rapports du GIEC et dénoncé des confusions.
Modèle de perspective
D'autres études scientifiques fondées sur un « modèle de perspective » suggèrent toutefois que la corrélation entre le changement climatique et d'autres conditions climatiques extrêmes pourrait être confirmée avec encore plus de certitude.
Selon les conclusions d'une enquête du Potsdam-Institut für klimafolgenforshung(l'institut de Potsdam pour la recherche climatique) révélées cette semaine, il est très probable que le réchauffement climatique soit responsable du nombre croissant d'évènements météorologiques extrêmes au cours de la dernière décennie.
« Nous nous sommes concentrés sur les évènements météorologiques extraordinaires des dix dernières années », a expliqué à EurActiv Dim Coumou, l'un des auteurs du rapport.
« Nous avons donc constaté un grand nombre d'évènements inédits, comme les vagues de chaleur qui ont frappé la Russie en 2010 et l'Europe en 2003, ou les précipitations très fortes qui se sont abattues sur le Pakistan en 2010 et l'Australie en 2011 », a-t-il déclaré.
Cette étude qui a fait l'objet d'une révision par les pairs et a été publiée dans la revue Nature Climate Change affirme que la durée des vagues de chaleur en Europe a presque doublé au cours des dix dernières années et que la fréquence des jours de chaleur a presque triplé entre 1880 et 2005.
Des étés extrêmement chauds
Des étés très chauds sont aujourd'hui observés sur environ 10 % du globe contre 0,1-0,2 % pour la période 1951-1980. Aux États-Unis et en Australie, presque deux fois plus de jours de chaleur que de jours de froid ont été enregistrés.
M. Coumou a déclaré que les conclusions des deux rapports n'étaient « pas fondamentalement différentes » malgré leurs approches distinctes, mais M. Stocker n'est pas du même avis.
« C'est comme si l'on comparait un pois et une énorme caisse d'oranges », a-t-il déclaré en soulignant que le rapport du GIEC avait pris en compte des milliers d'études différentes et l'avis d'un large éventail d'experts.
Les deux rapports affirment cependant qu'il est très probable que le XXIe siècle sera témoin d'une tendance au réchauffement et à la raréfaction des jours de grand froid.
« Le message clé est qu'il existe à présent une preuve scientifique solide que le réchauffement climatique anthropique est lié aux fortes précipitations et aux vagues de chaleur », a déclaré M. Coumou.
Climdev Maroc