Simo Ezoubeiri. « Je suis honoré de représenter le Maroc au Festival de Cannes 2021 »
Speck of dust

Basé à Chicago aux Etats-Unis, le photographe et cinéaste maroco-américain Simo Ezoubeiri nous parle de son dernier court-métrage « Speck of Dust » (Grain de poussière) qui sera projeté à Cannes dans la catégorie Short Film Corner, lors de la 73ème édition du festival prévue du 12 au 16 juillet 2021.

Passionné de photographie et de cinéma depuis son plus jeune âge, le cinéaste indépendant Simo Ezoubeiri se dit « fier et ravi » de voir son film sélectionné dans la catégorie Short Film Corner dans un festival aussi prestigieux que celui de Cannes. « Je suis très honoré de présenter le Maroc et notre cinéma émergent au Festival de Cannes », nous confie le réalisateur de Speck of dust ».

Le court-métrage du genre social dont les événements se passent en plein pandémie aborde la question des personnes âgées qui ont été les plus fragilisées face au Covid-19 : « Une population d’individus n’est plus jugée nécessaire, s’insurge le réalisateur. Autrefois nécessaires et maintenant dans le besoin, les générations plus âgées sont obligées de remettre en question leur valeur face à des besoins socio-émotionnels non satisfaits. Nos valeurs sont-elles vouées à disparaitre avec notre jeunesse ? », se demande le réalisateur marrakechi dans cette intrigue qu’il a conçu avec sa femme scénariste et poète, Megan Armbruster et qui met en scène Lahcen Ezoubeiri et El Hassan Amejal.

Installé à Chicago aux USA, Simo Ezoubeiri a étudié la photographie au Truman College de Chicago et a remporté le prix de la « Meilleure image de la semaine » décerné par la National Association of Photoshop Professionals (NAPP) aux États-Unis.

Speck of Dust de Simo Ezoubeiri


Votre court-métrage Speck of dust sera projeté au Festival de Cannes 2021. Quel est votre sentiment ?


Je suis tellement touché par cet honneur et le fait de représenter mon pays le Maroc au Festival de Cannes est un honneur pas comme les autres.

Parlez-nous un peu de votre court métrage ? Pourquoi cette thématique ?

L'audience de « Speck of Dust » témoignera d’une journée dans la vie d’une personne oubliée, et parfois même rejetée par sa société. L'aspect universel de cette expérience a été ressenti par nous tous à un moment ou à un autre de notre vie. Au lieu de détourner le regard avec inconfort, nous voulions nous concentrer sur les expériences de ces personnes laissées pour compte pendant la crise parce que je pense que les moments inconfortables font tout autant partie de l'être humain, et c’est aussi ce qui nous rend Humains. J’espère que le public pourra prendre un moment pour réfléchir, se connecter avec notre personnage et apprendre rien qu'en observant. On peut se demander ce qu'on pourrait apprendre si on se faisait observer chacun de nous dans sa vie quotidienne.

Qu’en est-il du casting et du choix des acteurs ?

Lahcen Ezoubeiri a déjà travaillé avec moi et j'ai pensé qu'il serait parfait pour ce rôle. Son timing devant la caméra est magnifique, son souci du détail et sa compréhension approfondie du comportement humain se démarquent des autres. Quiconque regardera ce film sera fasciné par sa présence et sa prestance et se retrouvera à jamais changé par sa performance. La voix off d'El Hassan Amejal interpelle le spectateur avec Lahcen Ezoubeiri. Son intonation et son rythme sont parfaitement adaptés au ton du film. En plus d’avoir fait la voix off du film, Amejal est aussi le seul responsable de la traduction de l'anglais vers le berbère.

Et pour ce qui est de la bande sonore ?

La conception sonore du film a été magistralement construite par Abdellatif Hamma. Son travail sonore dans "Speck of Dust" a amélioré l'ambiance et l'atmosphère tout en encapsulant un ton propice. Le haut calibre du son de "Speck of Dust” est cohérent avec le niveau de qualité présenté dans tous les films sur lesquels nous avons collaboré.

Vous avez aussi collaboré avec votre femme Megan Armbruster pour créer « Speck of Dust ».

Oui, ma femme Megan Armbruster est non seulement orthophoniste, elle vient aussi d'une famille de conteurs. Ce qui fait d'elle une thérapeute efficace fait également d'elle une conteuse, une écrivaine et une poétesse convaincante, à savoir sa capacité créative et réfléchie à se mettre à la place des autres. Non seulement cela lui permet d'observer, d'imaginer et de raconter des histoires de personnages, mais cela lui permet aussi de puiser dans ma vision de cinéaste.

Pourquoi cette passion pour le cinéma ?

J'ai découvert le pouvoir du cinéma dès mon jeune âge. Pour moi, le cinéma avait le pouvoir de transformer l'humeur de ceux qui m’entouraient, il avait le pouvoir de rassembler les gens et avait le pouvoir d'amener les autres à réfléchir et à parler de sujets, de personnes et de lieux avec tant de passion. J'ai réalisé que le cinéma peut toucher le cœur et défier l'esprit. Il nous permet aussi de réaliser que nos expériences ne sont pas seulement les nôtres.

Je crois que c’est mon père, Lahcen Ezoubeiri qui m’a transmis la passion du cinéma car lui-même, a eu un parcours très personnel avec cet art pas comme les autres. J'ai hâte d'explorer et de partager ce voyage du cœur dans un projet à venir qui me passionne. Comme moi, mon père était autodidacte et son goût et son instinct pour le domaine du cinéma lui ont apporté beaucoup de joie dans sa vie.

Quels sont les réalisateurs que vous admirez et pourquoi ?

J'admire l'imagerie et le timing imprévisible d'Andrei Tarkovsky car cela engage émotionnellement le spectateur à un niveau spirituel. Pour ce qui est du jeu des acteurs, j’admire les performances complexes des personnages dirigés par Ingmar Bergman. J'aime le travail de Nuri Bilge Cylan et je trouve que ses longues prises orchestrées permettent à l'espace physique de rejoindre le casting en tant que personnage à part entière.