Algérie. Monsieur le général de corps désarmé sort du bois
Il y a des généraux encore plus drôles que Charlie Chaplin dans le Dictateur

Le général gouverne et il parle. Il a fêté l’indépendance à sa manière en menaçant ceux qui veulent détruire l’Algérie. Un discours belliqueux d’un militaire qui démontre qu’en matière d’élections et de démocratie, l’Algérie n’a plus rien à apprendre... de l’Iran, du Vénézuela ou de Cuba.

« Nous adressons les plus fermes avertissements à tout esprit malade et assoiffé de pouvoir, nourrissant des velléités de porter atteinte à l’image et à la sécurité de l’Algérie, qu’ils sachent que la réponse sera dure et décisive ».

Ainsi s’exprimait « Monsieur le général de corps d’armée » dans la revue militaire à l’occasion du 59 ème anniversaire de l’indépendance de l’Algérie. Mais attention, le message est clair et ne nécessite aucune explication.

Selon cette même revue, « le discours de Monsieur le général de corps d’armée est clair et net et ne laisse place à aucune interprétation, comme il ne nécessite aucune explication ».

D’ailleurs Monsieur le général a toujours été très précis dans ses discours, pas la peine de chercher midi à quatorze heures. Et donc, « il incombe aux aventuriers et aux inconscients de reprendre le droit chemin, de retrouver leurs esprits et de cesser leurs turpitudes et autres vitupérations charlatanesques ».

C’est légitime de défendre l’image de l’Algérie, pays sans eau, sans carburant même s’il est un des plus grands producteurs de pétrole, sans lait et sans farine. C’est légitime aussi de défendre un pouvoir boycotté par le peuple. Et c’est donc légitime de préparer une réponse « dure et décisive".

Mais bon sang avec qui est-il en guerre ce généralissime? "Le peuple algérien... est en mesure de battre en brèche les intentions des courants suspects et leurs manœuvres visant à attenter à la sécurité et à la stabilité du pays ». Les courants suspects, voilà! Autrement dit les Algériens du Hirak qui ne veulent plus de « Monsieur le général » au pouvoir, ni du président que l’armée a installé à Al Mouradia.

Et puis bien sûr, il y a les Kabyles. "Ces traîtres n’ont de cesse de rendre visite à l’entité sioniste usurpatrice, non pas à des fins de tourisme ou pour prier dans les lieux saints d’El Qods, mais pour se tenir devant le Mur des Lamentations, verser des larmes et solliciter au passage le secours et supplier les ennemis pour qu’ils les aident à établir leur république platonicienne imaginaire ».

Et bien sûr aussi, comme d’habitude, on ne peut pas faire un discours sans parler de l’ennemi « sioniste », ça dure depuis les années soixante. Quand on veut discréditer quelqu’un et le condamner définitivement, on l’accuse de rage, euh de sionisme. Ça marche à tous les coups. Parce que cela permet de justifier l’impasse. Si les Algériens n’ont pas d’eau, si leur monnaie ne vaut plus rien, s’ils n’ont pas l’électricité parfois, c’est pas grave, on est en guerre contre « l’entité sioniste ». Et comme dans toute guerre, il faut savoir faire des sacrifices. Rompez!