Maltraitance infantile. Un phénomène inquiétant

En 2021, les enfants n’étaient nullement épargnés. Le bilan choc de l’association « Touche pas à mon enfant » rappelle la triste réalité d’une enfance largement maltraitée.



Si la loi du silence règne encore sur le triste vécu d’un grand nombre d’enfants maltraités, les chiffres révélés dans le dernier bilan de l’association « Touche pas à mon enfant » laissent perplexe. Phénomène en perpétuelle évolution, les maltraitances « déclarées » ont touché plus de 260 enfants. L’association active dans la protection de l’enfance affirme d’ailleurs avoir reçu 264 dossiers d'agressions touchant à l’intégrité physique d’enfants, tous âges confondus.

3 mois et déjà violée

Une violence double qui prend souvent une forme sexuelle comme l’affirment les données présentées par « Touche pas à mon enfant ». Ainsi selon son dernier bilan, parmi les 264 dossiers de maltraitance infantile reçus, 205 concernent des affaires de viol. Un état des lieux choquant dont les détails révèlent le douloureux vécu d’enfants abusés. Toujours d’après l’association, les filles seraient les premières victimes des abus sexuels. Ainsi 122 filles, dont 3 en situation de handicap, étaient victimes de viol contre 81 garçons. L’âge des victimes de viol du sexe féminin varie entre 2 ans et 17 ans. Profondément choquant, le bilan fait état du cas d’un bébé fille âgée à peine de 3 mois et 6 jours. Pas mieux lotis, l’âge des victimes garçons se situe entre 1 an et 16 ans. L’association nous apprend d’ailleurs qu’elle a reçu deux dossiers d’adultes ayant été violés et maltraités durant leur enfance. Les activistes de protection d’enfance affirment toutefois que les concernés refusent toujours de recourir à la justice pour poursuivre leurs agresseurs.

Maltraités, agressés, violés, les enfants peuvent courir de plus grands dangers. Les données de « Touche pas à mon enfant » font état d’affaires où le viol est doublé de meurtre. « En plus d’un dossier concernant une affaire concernant un viol doublé de meurtre, l’association a reçu 4 autres dossiers de meurtre d’enfants et 54 relatifs aux agressions physiques perpétrées sur des mineurs, dont la plupart ont été transférés à l’Observatoire national des droits des enfants (ONDE) », ajoute-t-on auprès de l’association.

Transmission intergénérationnelle

La maltraitance serait-t-elle un mal transmissible de mère à enfant ? Une importante étude australienne le confirme. D’après ses résultats, les enfants de mères maltraitées dans leur enfance ont plus de risques de l’être à leur tour. Un cycle violent infernal que les pédopsychiatres s’acharnent à rompre. L’étude australienne, a été menée rétrospectivement sur plus de 38.500 couples mère-enfants, suivis de 1986 à 2017, sur une durée de trente ans. Réunissant sept scientifiques de différentes disciplines, l’étude en question a tenté de cerner le facteur « Transmission intergénérationnelle de la maltraitance sur les enfants » tout en trouvant une « réponse politique susceptible de perturber cette chaîne de reproduction », explique Leonie Segal, initiatrice de l’étude et professeur d’économie de la santé et de politique sociale au Centre australien pour la santé de précision relevant de l’Université d’Australie du Sud.

Cette étude a d’ailleurs montré « un très fort risque de maltraitance familiale pour les enfants dont la mère a été maltraitée en étant enfant ». Publiés dans The Lancet Public Health en avril 2021, les résultats de cette étude révèlent que 83 % des cas de négligence ou maltraitance constatés sur des enfants ( 2 173 cas sur 2 631), concernent ceux dont les mères ont été elles mêmes victimes de maltraitance pendants leur enfance.

Un mal transmissible ? L’association « Touche pas à mon enfant » fait de la sensibilisation à ce fléau son cheval de bataille . « Il est primordial de sensibiliser la population aux dégâts psychologiques et aux conséquences sociales de la maltraitance et de la violence exercée sur les enfants », réclame Najat Anouar, président de l’association. Cette dernière insiste sur l’adoption d’une démarche pédagogique adaptée et axée sur cette question en parallèle avec des campagnes médiatiques de prévention, des interventions auprès des enfants et des éducateurs dans les établissements scolaires. « Ceci sans oublier le rôle primordial des structures d’aide sociale à l'enfance. En particulier dans les milieux précaires et isolés », conclut l’activiste.