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Information. Où sont les femmes ?

Comparées aux hommes, les femmes ont rarement voix au chapitre dans les médias audiovisuels. Latifa Akharbach l’a bien montré, le 29 avril lors d’un atelier organisé par la HACA à son siège à Rabat, à travers de nombreux graphiques extraits d’une étude de cette institution sur la représentation des femmes dans l’information au Maroc.
Exemple : en 2020, les femmes sont très peu représentées comme sources dans les thématiques politiques et gouvernementales (6%), bien que ces thématiques représentent 30% de l’offre d’information. “Or, l’information est une ressource essentielle pour la bonne marche de la démocratie”, a prévenu la présidente de la HACA.
L’inégalité femmes/hommes a été relevée dans tous les médias, à commencer par la radio où la “présence” féminine n’a atteint que 13% en 2020. La presse écrite fait un peu mieux avec 16%, suivie par la presse électronique avec 18%. Le plus haut taux a été constaté à la télévision avec 22%.









Ces indicateurs montrent que les journalistes (des deux sexes) sollicitent quasi systématiquement des experts ou des communicants hommes plutôt que leurs homologues femmes pour la plupart des sujets qu’ils disent “pointus”.
Syndicats et partis politiques contribuent eux aussi à cette invisibilisation systématique des femmes au profit des hommes. La répartition du temps de parole entre les sexe est édifiante à ce propos. En période électorale, les femmes n’ont représenté que 9% en 2011, 13% en 2016 et 19% en 2015 et 2021. Les hommes gardent donc bon an mal an plus de 80 % du temps d’antenne. Même en dehors des périodes électorales, les femmes n’ont jamais dépassé 18% du temps de parole entre 2010 et 2024. Là encore, les hommes dominent largement, avec des moyennes variant entre 82 % et 92 % du temps de parole, selon les années.
Même dans les photographies de presse, les femmes sont peu visibles. Exemple, en 2020, sur 92 photographies analysées, les hommes apparaissent seuls dans 71 % des cas, soit 2,45 fois plus visibles que les femmes. Pire, en 2025, sur 216 photographies analysées, les hommes apparaissent seuls dans 88 % des cas, soit 7,3 fois plus que les femmes.
Ces taux, et bien d’autres, représentent l’une des formes de “violence symbolique” - comme l’a qualifiée Latifa Akharbach en citant Pierre Bourdieu - frappant les femmes au Maroc, comme dans la plupart des 115 autres pays où la même étude est menée dans le cadre du projet mondial de monitorage des médias axé sur le genre.
Mais ce n’est pas parce qu’il s’agit d’un phénomène mondial qu’il ne faut pas s’en inquiéter au niveau local. Celles et ceux parmi les nombreux participants à l’atelier initié par la HACA, à commencer par des journalistes femmes et hommes, l’ont bien souligné dans le débat lancé à cette occasion, et qui a été modéré par le directeur général de la HACA, Benaissa Asloun. La présidente du Groupe de travail thématique sur l'égalité et la parité au sein de la Chambre des Représentants, Najwa Koukouss les a rejoints pour déplorer la sous représentativité et la mal représentativité féminines criantes dans les médias. “Il s’agit d’un phénomène de société auquel il faudrait s’attaquer en profondeur”, a-t-elle préconisé.
Ce débat a été enrichi notamment par le représentant du Conseil National des Droits de l’Homme, qui a mis en exergue le danger des biais misogynes véhiculés par l’intelligence artificielle. Ces échanges doivent en appeler d’autres, parce qu’une information privée de la contribution de la moitié de la société ne pourrait être que biaisée. Pour éveiller les consciences, la HAC a préparé en partenariat avec JaWjab cette capsule vidéo de sensibilisation diffusée actuellement à travers les réseaux sociaux.