Défense européenne. Le couple germano-français se brise
Olaf Scholz à la Charles University de Prague, août 2022. (Photo AFP)

La France en veut à l’Allemagne qui n’a pas choisi le système antimissile italo-français pour le projet de défense aérienne européenne. Un gros sujet de discorde qui fera certainement l’objet de discussions le 19 juin prochain lors d’une réunion, annoncée par la France, consacrée à la défense aérienne européenne.

La technologie a rendu les guerres plus mortelles et le danger vient plus des airs. Les missiles sans cesse développés contournent la contrainte humaine et redent caduque la notion même de soldat. Normal donc que les pays cherchent à concevoir des systèmes antimissiles. C’est même une obligation et le choix de l’engin n’est pas chose aisée. C’est une question de haute politique. Très haute politique. Un exemple.

L’Allemagne veut se protéger et invite les autres pays européens à en faire de même mais de manière collective afin de réduire les coûts de la protection aérienne. C’est l’initiative European Sky Shield (ESS) dans le cadre de l’OTAN. 14 pays membres ont suivi (Royaume-Uni, Slovaquie, Norvège, Lettonie, Estonie, Hongrie, Bulgarie, Belgique, République tchèque, Lituanie, Pays-Bas, Roumanie, Slovénie et Finlande). On l’aura remarqué plusieurs pays n’en ont pas voulu ou attendent d’y voir plus clair avant de décider. Mais déjà on constate l’absence de la France et de l’Italie, deux pays importants pour les questions de défense. 

Pourquoi ne sont-ils pas dans l’initiative ESS? Pour une question de matériel. 

L’Allemagne a opté son propre système l'IRIS-T SLM, le système israélien Arrow-3 et le système américain Patriot. Il n’est donc pas question du système franco-italien SAMP/T (Sol-Air Moyenne Portée / Terrestre). Et c’est là que la défense européenne bloque. La France n’est pas contente. 

Pour Olaf Scholtz « un système de défense aérienne bâti conjointement en Europe serait non seulement moins cher et plus efficace que si chacun de nous construisait sa propre défense aérienne ». Mieux encore, « ce serait un gain de sécurité pour toute l’Europe et un excellent exemple de ce que nous voulons dire lorsque nous parlons de renforcer le pilier européen de l’Otan », argumentait-il, à Prague en 2022. 

Réponse indirecte du président français: « quand je vois certains pays qui accroissent leurs dépenses de défense pour acheter massivement du non européen, je leur dis simplement, « vous préparez vos problèmes de demain ! ». Par conséquent, « il nous faut utiliser ce moment pour produire davantage en Européens ». C’était en mai dernier à Bratislava, capitale de la Slovaquie. Le Français veut montrer que c’est la défense européenne qui l’intéresse et que la question n’est pas de favoriser l’industrie française.  « La défense aérienne de notre continent, c’est une question stratégique, solidaire et aux multiples ramifications. Elle ne peut se résumer à la promotion d’une industrie nationale ou d’industries tierces aux dépens de la souveraineté européenne », avait-il plaidé en Slovaquie toujours.

N’empêche, l’Allemagne poursuit son projet et comme l’a annoncé Reuters, sa décision d’acquérir le système de défense antimissile israélien est définitive. Le montant de la transaction est même connu, 4 milliards d’euros. Que pourrait dire le président français à son homologie allemand à la réunion du 19 juin? Enfin, si Olaf Scholz assiste bien sûr.