Génocide et crimes contre l’humanité. La France qui juge, la France coupable
Les gloires de l'armée française

L'ancien médecin rwandais Sosthène Munyemana a été condamné mercredi à 24 ans de réclusion criminelle, avec une période de sûreté de huit ans, pour son implication dans le génocide des Tutsi en 1994. Soit, la France juge les autres, n’a-t-elle rien à se reprocher?

C’est un tribunal français qui l’a reconnu coupable de génocide, crimes contre l'humanité, participation à une entente en vue de la préparation de ces crimes, ainsi que pour complicité de crimes contre l’humanité.

Pourquoi la France juge-t-elle des crimes qui ne se sont pas passés sur son territoire? C’est parce que la justice française s’est octroyé la compétence universelle. Les juges français peuvent juger tout le monde n’importe où. 

Cette même France qui n’a pas un passé glorieux en matière de génocides et de crimes contre l’humanité. La preuve? Aujourd’hui encore elle détient dans ses musées les crânes de ses victimes. Certaines ont été décapitées, d’autres torturées, fusillées ou égorgées.

D’ailleurs, le Parlement français devait adopter lundi dernier une loi sur la restitution à des Etats étrangers de restes humains appartenant aux collections publiques. Et dans ces restes, on parle du crâne d'un roi malgache décapité par les troupes coloniales françaises. Il faut passer par une loi parce que le pays a institué le "principe d'inaliénabilité" des collections. Quand un crâne entre dans la collection, il n’ira plus nulle part. Les Français ont le droit de venir contempler l’oeuvre de leur armée.

Madagascar réclame d'ailleurs trois crânes Sakalaves. Les Sakalaves sont un peuple vivant dans l'ouest de l'île. Collectés à la fin du XIXe siècle, en pleine conquête coloniale, ls crânes sont conservés au Musée de l'Homme à Paris, en compagnie de plusieurs centaines de vestiges humains provenant de Madagascar.

Parmi ces trois crânes: celui supposé du roi Toera, décapité en 1897 à Ambiky, ancienne capitale royale du Menabe, lors d'une attaque des troupes coloniales françaises pour mater une rébellion. L'historienne de l’Afrique, Klara Boyer-Rossol,a qualifié cette attaque de "véritable massacre ».

La France a vite oublié son passé génocidaire, les photos de ses soldats exhibant les têtes des personnes assassinées. 

L’histoire n’a pas où se cacher. 

Le témoignage de Jeannette Kamtchueng, citée dans l’article « Massacres Au Cameroun, Génocide Perpétré En Pays Bamiléké Par Une Campagne Militaire Française » sur le site www.jmtvplus.com:

« L’armée ne fait pas de quartier. Les cadavres sont exposés dans les villages, de même que les têtes des prisonniers qui ont été décapités. Entre février et mars 1960 cent cinquante-six villages bamilékés sont incendiés et rasés. Un bilan méticuleux des destructions de biens publics sera opéré : 116 classes, 3 hôpitaux, 46 dispensaires, 12 stations agricoles, 40 ponts seront détruits. Personne n’a recensé les logements privés détruits ni les récoltes incendiées. Personne n’a pu dénombrer les dizaines de milliers de civils qui ont été massacrés. On ne saura jamais ».

En fait de génocide « les Bamilékés en ont connu entre 1955 et 1965. Les chiffres tournent entre huit cent mille et un million de morts dans la région des Hauts-Plateaux et dans les autres villes telles Douala, Yaoundé, Sangmélima, Ebolowa, Nkongsamba » affirmait Jacques Kago Lélé dans « Tribalisme et exclusions au Cameroun : le cas des Bamileke ». Les services secrets français ont même réussi à empoisonner le leader de l’UPC, Felix Moumié, le 2 octobre 1960, à Genève », disait-il.

Si la compétence universelle peut fonctionner dans un sens, elle peut tout aussi bien être actionnée dans l’autre. Comme les crimes contre l’humanité et le génocide ne sont pas prescriptibles, il y a matière ester.  

Pour revenir à l'histoire du Rwanda, l'implication de la France dans le génocide est toujours en discussion. Juste pour info.