Projets hydrauliques à la traine. La cour des comptes tire la sonnette d'alarme
La Cour des comptes pointe des retards dans le Plan national de l'eau au Maroc, contribuant à la pénurie.

La Cour des comptes pointe les retards dans la mise en œuvre du Plan national de l'eau au Maroc, contribuant à la sévère pénurie actuelle. Elle appelle à une action immédiate pour remédier à cette situation critique.

« La sévère crise de pénurie d'eau qui frappe actuellement le Maroc n'est pas uniquement le résultat des années de sécheresse, mais également d'une série de retards et d'obstacles entravant la mise en œuvre du Plan national de l'eau », selon le rapport annuel 2022-2023 de la Cour des comptes. Ces retards ont notamment affecté la construction de grands barrages, l'interconnexion des bassins hydrauliques, et l'amélioration des réseaux de distribution d'eau potable. La cour des comptes estime que « la situation critique aurait pu être améliorée si ces projets avaient été réalisés conformément aux échéances fixées ».

Le constat est alarmant : le taux de réalisation des grands barrages prévus pour la période 2010-2020 ne dépasse pas 53%, avec seulement 16 sur 30 construits, déplore la cour les comptes. Les raisons de ces retards sont multiples, allant de la lenteur de la procédure d'expropriation à la nécessité de recourir à des marchés complémentaires en raison de volumes de travaux plus importants que prévu. « Les barrages construits au cours de la période 2010-2020 n'ont ajouté que 30% de la capacité de stockage d'eau prévue d'ici à 2030 », ajoute la même source.

Quant aux petits barrages, le rapport indique une réalisation bien en deçà des objectifs fixés par la Stratégie nationale de l'eau, avec seulement 15% des 500 prévus effectivement construits.

Les projets d'interconnexion des bassins hydrauliques ne sont pas en reste, accusant un retard de plus de 10 ans dans la réalisation des études nécessaires. En effet, la première phase de ces initiatives visant le transfert d'eau du nord au sud aurait dû être conclue à la fin de l'année 2020, permettant ainsi le transfert de 400 millions de mètres cubes par an. Cependant, bien que les études aient débuté en 2007, elles sont toujours en cours jusqu'à septembre 2023, bien au-delà de la date d'achèvement prévue en 2013. Ces retards, couplés à l'absence de mesures concrètes pour mobiliser les fonds nécessaires, ont entravé le lancement de ces projets, évalués à 30 milliards de dirhams.

En outre, suite aux études préliminaires du Plan national de l'eau 2020-2050, des ajustements substantiels ont été apportés aux projets initiaux d'interconnexion des bassins hydrauliques, pour tenir compte de l'impact du changement climatique.. Conformément aux conclusions du rapport, les nouveaux plans prévoient notamment l'interconnexion des bassins du Sebou, du Bouregreg et de l'Oum Er-Rabia avec un volume total de transfert d'eau oscillant entre 500 et 800 millions de mètres cubes, ainsi que celle des bassins côtiers ouest-méditerranéens avec les bassins côtiers est-méditerranéens et celui de la Moulouya avec l'objectif de transférer annuellement 500 millions de mètres cubes d'eau.

Sur le volet de l'amélioration du rendement des réseaux de distribution d'eau potable, le rapport révèle une moyenne nationale de seulement 76%, en deçà de l'objectif fixé à 80% en 2020. Bien que le rendement ait progressé depuis 2006, la cour des comptes souligne qu'il n'est soumis à aucun contrôle externe, compromettant ainsi sa crédibilité.

Face à ces constats, le rapport note que le ministère de l'Intérieur a répondu en imposant des audits indépendants et internes aux régies de distribution d'eau potable et aux sociétés de gestion déléguée, appelant à la mise en œuvre des recommandations issues de ces audits.