Mendicité : Les exploitants dans la ligne de mire
La pauvreté premier facteur de risque

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) s'attaque à la mendicité dans son dernier avis. Il vient d'émettre des recommandations visant à améliorer les programmes de prise en charge sociale des catégories vulnérables pour mieux les protéger de l'exploitation.

Interpellé par la grande propagation de la mendicité dans les rues et les espaces publics, le Conseil économique, social et environnemental (CESE) vient de formuler un avis spécial à ce propos. Une auto-saisine que le CESE explique, dans un communiqué, par l'ampleur du phénomène, sa complexité et son impact sur les individus, la société et l'ordre public.

Facteurs de risque

" Cette pratique, portant atteinte à la dignité humaine et aux droits fondamentaux des personnes qui la pratiquent, touche en premier lieu les catégories vulnérables qui ont besoin de protection contre toute exploitation et trafic, notamment les enfants, les femmes, les personnes âgées et les personnes handicapées ", précise Ahmed Reda Chami, le président du CESE.

Des cibles privilégiées des trafiquants de la mendicité, ces catégories se retrouvent souvent exposées à l'exploitation. D'après Abdelmaksoud Rachdi, membre du Conseil, certains facteurs de risque contribuent d'une manière significative à l'enrôlement des personnes en situation précaire. Il cite l'abandon de la famille, le divorce ou la perte du soutien familial pour les femmes, les faibles niveaux d'éducation et de formation, le déclin des valeurs de solidarité familiale et l'état de santé de la personne (santé physique, mentale et handicap).

Protéger pour mieux lutter

Pour lutter contre le phénomène, le CESE recommande une série de mesures qui se décline en quatre axes intégrés. A commencer par l’éradication complète de l’implication des enfants dans la mendicité. Comment ? En renforçant le soutien aux unités de protection de l'enfance (UPE) en termes de structuration, d’organisation, de moyens humains et matériels, ainsi que par le renforcement des mesures répressives à l'égard des exploiteurs et trafiquants d'enfants, qu'ils soient parents ou étrangers à l'enfant.

Le deuxième axe consiste à assurer la protection des personnes vulnérables contre l’exploitation à des fins de mendicité. Conformément au Code pénal, il va falloir réprimer sévèrement les actes délictuels et criminels dissimulés sous couvert de mendicité. Ceci en particulier lorsqu'il s'agit de victimes femmes, de personnes âgées et de personnes en situation de handicap. " Sans oublier le reforcement des politiques de protection et de soutien aux personnes en situation de handicap et âgées et les mesures d’accompagnement et d’intégration socio-économique des populations migrantes "; ajoute le communiqué du CESE.

Réinsertion des victimes

La réhabilitation et la réinsertion des personnes en situation de mendicité constitue le troisième axe de la stratégie de lutte élaborée par le CESE. Ce dernier recommande par ailleurs la révision du dispositif juridique actuel, notamment en mettant fin à la pénalisation de la mendicité.

L'argument du Conseil ? La difficulté de déterminer la capacité de la personne à subvenir à ses besoins et étant donné que les infractions criminelles, qu'elles soient individuelles ou collectives, associées à cette activité, sont déjà prises en compte dans de nombreuses dispositions du code pénal. S'attaquant à la source du mal, le CESE propose des alternatives à la mendicité via les politiques d’assistance sociale, le développement des activités génératrices de revenus et l’amélioration de la prise en charge des personnes atteintes de troubles psychiques.

Et puisqu'il vaut mieux prévenir que guérir, le quatrième axe se base sur " la prévention de la mendicité ". Pour le CESE, la meilleure manière serait de renforcer la résilience socioéconomique des ménages par la lutte contre la pauvreté et les inégalités sociales et spatiales. Mais aussi à travers l’amélioration de l’accès aux soins, à l’éducation, à la formation et à l’emploi.