Lundi 30 septembre, Paris
Vincent HERVOUET

Joseph Maïla sera-t-il le premier directeur de l’Unesco venu du Moyen-Orient ? En bonne logique, le tour est venu du monde arabo-musulman. La candidature de l’égyptien Farouk Hosni avait été torpillée, il y a quatre ans. Le ministre de la culture d’Hosni Moubarak avait été rattrapé par ses déclarations antisémites qui lui avaient valu un véto des Occidentaux. Avec son itinéraire singulier, Joseph Maïla ne risque pas pareille mésaventure. C’est un grand intellectuel bardé de diplômes et à l’aise dans plusieurs mondes, comme le Liban en produit. Il a connu la guerre civile puisqu’il est rentré au pays avec ses doctorats quand elle a commencé. Il l’a traversé aux premières loges, en tant que vice doyen de la grande université privée de Beyrouth. Il est ensuite venu s’installer à Paris pour gouverner l’Institut catholique. C’est là que Bernard Kouchner, ministre des Affaires étrangères, viendra le chercher pour créer un « pôle religions » au quai d’Orsay. Joseph Maïla a pris goût à cette seconde vie de diplomate, jusqu’à devenir le patron de la prospective. Avec un tel bagage, son élection ferait renouer l’Unesco avec ses origines. Il y a quatre ans, c’est par défaut qu’une ancien ministre Bulgare a été élue. C’est par le vide qu’Irina Bukova a gouverné. Son bilan est évanescent. Le réquisitoire de ses adversaires est implacable. Est-ce que l’Unesco mérite autant de passion ? L’institution somnole au point qu’on a l’impression de visiter un vaisseau fantôme quand se rend dans ces bâtiments mal vieillis et abandonnés aux bureaucrates avec immunité diplomatique derrière l’Ecole militaire à Paris. S’y résigner, c’est oublier que dans la bataille des idées, dans le sauve qui peut général qu’a suscité la mondialisation et face aux défis que représentent les fondamentalismes, l’éducation et la culture sont des enjeux décisifs. L’Unesco a déserté ce terrain. On n’entend parler de l’agence onusienne qu’à propos du classement des sites au patrimoine mondial de l’humanité. Est-ce que vraiment son rôle doit être confiné à la mise à jour de cet annuaire ? L’Unesco, elle-même est un monument en péril. Il ne faut pas en faire un musée ou un mouroir pour favoris en disgrâce. Mais la réveiller de toute urgence et la rappeler à sa mission première. Les sciences, les arts et la culture. La ligne de front des idées. L’élection du nouveau directeur devrait prendre un mois et demi, sauf si Irina Bukova parvient à se faire reconduire dès le premier tour, vendredi.