Libre cours
Naim KAMAL

C’est Radio France Internationale qui parle : « Rarement mobilisation pour accueillir un hôte n’aura atteint celle réservée au roi du Maroc, ce lundi 3 mars à Conakry. Dans une parfaite communion, les Guinéens, sans distinction d’opinion, ont réservé au souverain marocain un accueil royal sur les quatorze kilomètres qui séparent l’aéroport international du quartier administratif de Kaloum où le roi a élu domicile. La foule en liesse a ovationné celui qu’elle a appelé « l’ami sûr de la Guinée et des Guinéens ». Mohammed VI a sa propre touche, un intérêt particulier pour le continent, une approche qui allie affection et pragmatisme, un contact chaleureux avec les populations en allant spontanément à leur rencontre dans les rues, parfois au mépris des règles élémentaires de la sécurité. De la tournée africaine du souverain, on retiendra que le capital sympathie pour Mohammed VI est réel et profond. Sa manifestation à Conakry ne pouvait qu’être différente. Il y a la personnalité du roi et il y a aussi l’histoire. L’histoire de trois rois et trois présidents dont la solidité des relations, quelles que soient les contingences, ne s’est jamais démentie. Mohammed V-Sékou Touré, Hassan II-Sékou Touré, Hassan II-Lasana Conté, Mohammed VI-Lansana Conté et aujourd’hui Mohammed VI-Alpha Condé. Pas l’ombre d’un nuage. Bien sûr la Guinée a eu deux autres présidents mais dans une période trouble où leur passage ressemble plus à une transition qu’à une véritable présidence.

Les Guinéens ont tenu à rendre hommage à Mohammed V qui a œuvré au sein du groupe de Casablanca à la libération de l’Afrique et à son union. Du côté de la Guinée, il y a, à la même époque, un homme qui a marqué l’histoire de l’Afrique. Aucune œuvre n’est parfaite, mais l’homme qui a dit non à de Gaulle lorsque l’ancien président français était parti à Conakry proposer son projet d’union-partenariat aux colonies françaises, est une des grandes figures de l’histoire. Sékou Touré, qui a été de tout temps la bête noire de Jacques Foccart, le monsieur intrigues africaines de la cinquième république française, est, avec Mohammed V, Kwame Nkrumah du Ghana, Modibo Keita du Mali, Léopold Sédar Senghor du Sénégal, Félix Houphouët-Boigny de la Côte d’Ivoire, l’un des pères de l’indépendance de l’Afrique. La guerre froide et le partage du monde entre bloc de l’Est et bloc de l’Ouest a introduit bien des fissures dans l’Union africaine. Et au moment où de nombreux pays africains, souvent menés par des putschistes, sans rapport avec l’histoire de l’indépendance, choisirent sous l’instigation de Moscou et de l’argent algérien de contrarier, sous l’appellation pompeuse et fallacieuse du camp progressiste, la récupération du Sahara par le Maroc, Sékou Touré resta non seulement inflexible, mais milita concrètement pour la défense des intérêts du royaume. Là où les amis du Maroc, ils étaient vingt-quatre Etats sur cinquante, se contentaient de voter, le défunt président guinéen montait au créneau pour dénoncer l’imposture. Deux autres chefs d’Etat eurent la même attitude, Léopold Sédar Senghor et Omar Bango. Mohammed VI est actuellement l’hôte de son fils