Libre cours
Naim KAMAL

En principe Abdelilah Benkirane devrait le savoir, le rôle de l’épouse du prophète, Khadija, dans l’avènement de l’Islam est immense. Ce serait d’ailleurs lui faire injure que de laisser croire qu’il puisse ne pas être au courant. Mais à toute fin utile, je le renvoie à la série d’articles que l’éminent intellectuel Abdejlil Lahjomri a consacrée dans quid.ma à la première épouse du prophète en réponse à l’ouvrage approximatif de Marek Halter. Il découvrira que la femme est autre chose que la vision étriquée qu’il en a. Réduire celle-ci à une couveuse doublée d’une berceuse assortie d’une essoreuse c’est n’avoir retenu de l’Islam que ce qu’en ont fait des imams à travers l’histoire pour reconduire au fil des siècles une société patriarcale et phallocrate. Je le soupçonne d’ailleurs de double Je, un Je islamiste qui raconte à ses troupes conservatrices ce qu’elles veulent entendre, et un Je domestique où c’est la femme qui porte le pantalon à la maison. Je ne connais pas l’épouse du chef du gouvernement mais le peu que j’ai aperçu d’elle m’a laissé l’impression d’une forte présence. Et je la vois mal se contenir dans le rôle que son vénérable époux a fixé pour la femme devant les honorables représentants de la Nation, une têteuse bonne à faire des enfants et à les voir grandir. La plus éloquente expression de la forte présence de Mme Benkirane - je dis Mme Benkirane parce que je ne connais pas son nom et que je sais qu’en Islam en se mariant une femme garde entière son identité - a été sa sortie remarquée dans la manifestation de solidarité avec les frères musulmans de la place Rabiaa en Egypte, sans se soucier de l’embarras diplomatique qu’elle pouvait causer à son chef de gouvernement de mari. A moins que ce ne soit là un autre double jeu. L’époux qui se fait discret pour ne pas mettre en péril sa position au sein de l’Etat et son épouse qui se transforme le temps d’une manifestation en la porte-parole du fond de sa pensée. Mais on est alors dans une répartition des tâches et une division du travail loin de la conception que Abdelilah Benkirane nous vend de la femme. Et ce n’est pas la cohérence qui l’étouffe. Avec un brin de conséquence et avant même d’aller devant les parlementaires, le chef du gouvernement aurait dû renvoyer la ministre Hakkaoui et consorts ainsi que toutes les femmes de son parti chez elles couver leurs enfants et chérir leurs maris. Ça ferait pas mal de places pour les hommes du PJD et des bien contestataires à contenter ❚