« Des fourmis dans la bouche » de Khadi Hane
Khadi Hane

Dans son roman « Des fourmis dans la bouche » qui vient de paraitre aux Editions le fennec, et pour lequel elle a reçu le Prix Thyde Monnier 2012 de la Société des Gens de lettres, la sénégalaise Khadi Hane décrit avec amertume la difficile liberté d’une femme africaine vivant en France.

« Des fourmis dans la bouche » raconte l’histoire de Khadija, d’origine malienne qui élève seule ses quatre enfants à Paris, dans le quartier de Château-Rouge. Pétrie de double culture, musulmane mais le doute chevillé au corps, elle se retrouve petit à petit exclue de sa communauté à cause de sa liaison avec un Blanc, le père de son fils métis.

Injustice, bêtise et humour

Cercle après cercle, depuis ses voisines maliennes jusqu’aux patriarches du foyer Sonacotra et à ses propres enfants, Khadija passe en jugement. Mais cette absurde comparution, où Africains et Européens rivalisent dans la bêtise et l’injustice, réveille en elle une force et un humour inattendus.

Tableau intense de Château-Rouge, le roman de Khadi Hane est porté par une écriture inventive au ton très singulier, fondée sur la double appartenance. Un roman qui traite subtilement de l’enfer que peur vivre une femme africaine en France lorsqu’elle choisit de partager sa vie avec un homme blanc. L’extrait où l’autrice décrit le marché de Dejean, laisse entrevoir un soupçon de racisme : « Gratteurs d’écailles dans une poissonnerie, vendeurs ambulants de montres de pacotille ou de statuettes en bois, journaliers payés au noir pour décharger des sacs d’un camion, hommes à tout faire d’un commerçant pakistanais qui revendait des pots de crème à l’hydroquinone censés procurer aux nègres l’éclat d’une peau blanche, la leur ne faisant plus l’affaire. »

Née à Dakar en 1962, Khadi Hane qui a poursuivi ses études en France vit aujourd’hui à Paris. En 1998, elle publie son premier roman, Sous le regard des étoiles (Nouvelles éditions africaines du Sénégal). Suivent, entre autres, Le collier de paille (2002), Ma sale peau noire, Il y en a trop dans les rues de Paris (2005), Des fourmis dans la bouche (Denoèl, 2011) et Demain, si Dieu le veut (Joëlle Losfeld, 2015).