En grève, les infirmiers paralysent les stations de vaccination
Les infirmiers paralysent les stations de vaccination

Les infirmiers sont aujourd’hui à leur deuxième jour de grève. Ils affirment maintenir le prochain rendez-vous du 25 et 26 mai.



Le torchon brûle toujours entre les blouses blanches et le Ministère de la santé. La crise sanitaire liée à la pandémie n’a fait qu’augmenter la tension et aggraver la situation déjà tendue. Annoncée au début du mois par le Mouvement des infirmiers et des techniciens du Maroc (MITM), cette grève nationale serait selon ses initiateurs un dernier recours. « Nous avons toujours pris en considération les circonstances actuelles liées à la crise sanitaire et à la pandémie. Mais aujourd’hui nous sommes obligés de mener ces deux grèves nationales pour protester contre une situation devenue insoutenable et intolérable », nous explique alors Fatim Zahra Belline, coordinatrice de la cellule communication et presse du Mouvement des infirmiers et des techniciens de santé du Maroc (MITM).

Soutenu par les différents représentants syndicaux, le Mouvement monte au créneau et rappelle les revendications principales des infirmiers et des techniciens de santé. A travers ces deux grèves, de 48 heures chacune, les infirmiers usent de la grève comme carte de pression afin de « restituer à la profession sa valeur et son indépendance », comme le proclame la porte parole du MITM. Dans la ligne de mire des protestataires, la loi 43-13 relative à l'exercice des professions infirmières dont les décrets d’application ont été homologués par le Conseil du gouvernement au début du mois d’avril.

Taux de participation de 80%

« Les taux de participation diffèrent entre les périmètres urbain et celui rural. Aussi entre les hôpitaux et les stations de vaccination. Ceci dit, la grève a enregistré un grand succès à travers le territoire national et le taux de participation a atteint plus de 80% auprès des infirmiers et des techniciens de santé », nous affirme au téléphone, Hamza Ibrahimi, responsable communication du Syndicat marocain de la santé publique. D’après ce dernier, ce taux de participation important concerne aussi bien les CHU, les hôpitaux provinciaux et régionaux que les dispensaires ou autres centres de santé dont les stations de vaccination. « Comme d’habitude, les services d’urgence ont été maintenus et assurés comme c’est le cas lors de chaque grève », ajoute l’activiste syndical.

En grogne contre les lois régissant la profession, les infirmiers ne cessent de réclamer la mise en place de l’Ordre des infirmiers tout en rejetant la tutelle controversée des médecins... Un tas de revendications qui s’ajoutent au dialogue social qui coince et la situation critique des infirmiers surtout après le déclenchement de la pandémie du Covid-19. A cran à cause de la grande charge du travail, de leur privation de congé depuis plus d’un an et de la grande pénurie des ressources humaines, les infirmiers ne sont pas arrivés à avaler la pilule lorsque la loi a imposé la tutelle des médecins. Une condition sine qua non pour avoir l’autorisation de pratiquer la profession au privé. Mais pas seulement.

Réclamations

« Ces décrets étaient la goute qui a fait déborder le vase. Ils donnent le droit de pratiquer la profession à des gens n’ayant pas leur baccalauréat, ayant décroché un diplôme d’école privée au bout d’un an seulement de formation qui n’est d’ailleurs pas assez qualifiante », s’insurge Belline. « Ceci alors qu’un infirmier formé dans l’école d’état doit suivre un cursus (théorie et pratique) étalé sur trois ans durant voire plus pour pouvoir s’acquitter correctement de son devoir », ajoute-t-elle.

Ouvrir, par la force de la loi, la porte à des aides-soignants non qualifiés pour pratiquer le métier d’infirmier... Les représentants des blouses blanches trouvent que c’est juste une manière de servir les intérêts des cliniques privées. « Ces dernières préfèrent recruter des aides soignants peu qualifiés car moins couteux. Et qu’importe la santé des citoyens et des patients. C’est une véritable aberration », regrette la chargée de communication du Mouvement des infirmiers.

« Les infirmiers réclament l’indépendance de leur profession et refuse la tutelle des médecins lorsqu’il s’agit d’accorder l’autorisation pour pratiquer le métier en libéral », nous explique Mustapha Jâa, chercheur en Droit de santé. « En effet, nous refusons en particulier l’article 6 du décret 2-19-83 stipulant que l’autorisation de pratiquer le métier est accordée par la tutelle en concertation avec l’Ordre des médecins », dénonce la représentante du MITM. Réclamant la mise ne place en urgence de l’Ordre des infirmiers, les grévistes maintiennent la pression sur la tutelle. Cette dernière a d’ailleurs annoncé hier le report des opérations de vaccination contre Covid-19, prévues pour ce week end à une date ultérieure à l’occasion de la fête du travail.