Lucky Peterson « Le Blues, c’est toute ma vie »
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Avec plus de 40 ans de carrière derrière lui, la légende américaine du Blues a subjugué ses fans marocains grâce à sa fusion magique avec Maâlem Baqbou mêlant tagnaouite et groove imparable. Sur une rythmique implacable, les deux maîtres ont enflammé la scène Mly Hassan avec leur jeu hypnotique.

Natif de Buffalo, près de New York, Lucky Peterson, âgé de 52 ans, fait partie de ces rares génies qui ont le Blues dans le sang. Fils du célèbre guitariste et propriétaire du club de Blues « Governo’s Inn », James Peterson, Lucky côtoie les plus grands depuis son plus jeune âge comme Muddy Waters, Buddy Guy, Jimmy Reed ou Koko Taylor. En 1969, il se fait repérer par l’immense Willie Dixon qui fait de lui à l’âge de 5 ans une star reconnue du milieu.

Maîtrisant sa tradition orale et son histoire à la perfection, l'un des dépositaires les plus authentiques du Blues sait le jouer et le chanter comme personne. Son style assimilé souvent à celui de B.B.King ne laisse personne indifférent. De la scansion des mots, aux mélodies lancinantes jusqu’aux rythmes hypnotiques, le maître du blues offre des sonorités enivrantes, entre compositions originales et reprises inspirées (Stevie Ray Vaughan, Wilson Pickett, Johnny Nash, Pronce, Ray Charles…), Lucky Peterson a enflammé la scène Mly Hassan et sa prestation époustouflante du blues mixant soul, rhythm'n'blues et quelques étincelles de gospel et de rock'n'roll, restera longtemps dans les annales. Une belle manière de célébrer en apothéose la 20e édition du Festival de Gnaoua d’Essaouira pour celui qui a su royalement remettre la plus ancienne des musiques noires américaines, sur le devant de l'actualité.

C’est la 1ère fois que vous vous produisez au Maroc, comment imaginez-vous l’ambiance ?

D’abord, je suis très fier de me retrouver au Maroc. Je m’attends à ce que le public se déchaine en entendant ma musique, et surtout à ce que les gens puissent s’amuser et avoir du bon temps.

Cette année est très spéciale puisque on célèbre le 20e anniversaire du Festival Gnaoua. Quel est votre sentiment ?

J’aime ça, j’adore les gens, ils sont très chaleureux, joyeux, sans aucune confusion. J’adore ma chambre, j’ai une vue magnifique sur l’océan. La musique Gnaoua est un style complètement nouveau pour moi et je suis ravi de pouvoir fusionner ce soir avec l’un des maîtres de cette musique ancestrale.

Vous allez justement fusionner ce soir avec le célèbre Maâlem Baqbou, un des maîtres gnaouis. Son concert il y a 2 ans avec Marcus Miller était mémorable. Selon vous, qu’est ce qui fait la réussite d’une fusion, parce que ce n’est pas toujours le cas ?

"Pour qu’une fusion fonctionne, il faut être passionné et être à l’écoute de l’autre. Ça vient au feeling !"

Pour moi, jouer de la musique, c’est avant tout pour passer un bon moment, s’éclater et surtout un moyen de communiquer avec les autres. Vous savez, quand on est passionné, ça coule de source. On va rajouter bien sûr notre touche, et donc du Blues à ce qu’il fait, et pareil pour lui, il va fusionner ce qu’il fait avec ce qu’on joue. C’est important de s’écouter et laisser à chacun la place pour s’exprimer. On va également improviser et fusionner ensemble juste au bon moment, ça fonctionne beaucoup au feeling !

Envisagez-vous d’enregistrer dans le futur un album avec lui ou autre ?

Bien sûr, pourquoi pas. Je suis ouvert à toute sorte de collaboration.

Vous avez baigné très tôt dans la musique, vous étiez déjà une star lorsque vous aviez 5 ans, votre père était propriétaire d’un club de jazz très célèbre : The Governor Inn. Vous avez commencé à jouer de l’orgue avant de switcher vers la guitare. Pourquoi ce revirement ?

D’abord, parce que mon père était guitariste et ensuite la plupart des gens qui venaient au club de mon père étaient de grands guitaristes, donc, la question ne se posait même pas ! Je me suis spontanément adapté à la guitare et c’est devenu un peu mon instrument de prédilection. Ceci étant, j’adore tous les instruments, l’orgue, la batterie, la basse,… je porte un peu toutes les sonorités à l’intérieur de moi.

Vous avez souvent dit que c’est « le Blues qui vous a choisi et non l’inverse ». Que représente justement le Blues pour vous ?

La vie, c’est ce qui me permet de m’exprimer chaque jour de ma vie, je ne conçois pas de vivre sans musique. Ça serait d’ailleurs une vie terrible et sans goût. En fait, la musique nous permet de survivre !

Vous êtes une légende vivante du Blues. Qu’est-ce qui vous inspire encore aujourd’hui en tant que musicien et compositeur ?

Ma famille, les gens et la vie en général. Aussi le fait de pouvoir se réveiller chaque matin et contempler les créations de Dieu. Ma femme est ma fille sont toutes les deux des chanteuses et elles vont d’ailleurs m’accompagner ce soir. On va jouer quelques tubes du Blues, de la soul, des chansons d’amour, des musiques revues et plus modernes, du Ray charles, Prince…

Et la musique africaine pour vous ?

C’est l’origine, les racines mêmes du Blues, c’est vrai, je vais jouer avec un grand maître gnaoui, et donc, je suis là pour jouer de la musique et passer du bon moment. Je ne prétends pas dire «  on va faire les choses de cette façon ou autre », ça vient au feeling, sur le tas, et je veux que les gens s’éclatent avec nous.

Votre album, « The Son of a blues man », est beaucoup plus personnel, où vous évoquez votre carrière très jeune, c’est un peu un hommage à votre père ?

Oui, c’était un hommage à mon père, à la vie et à tout ce que j’ai pu traverser jusqu’ici en tant que musicien. C’était à propos de mon enfance et du fait que j’ai grandi en jouant du Blues. Ma femme et ma fille aussi ont grandi en jouant de la musique, on a la musique dans le sang en quelque sorte. Et puis, i y a des hauts et des bas…

Vous êtes à la fois musicien, chanteur et compositeur. Pour quelle passion penchez-vous le plus ?

J’adore tout en fait. J’aime bien chanter, j’aime la musique, j’adore jouer, créer et faire des arrangements…

Les musiciens que vous ont inspirés ?

J’adorais B.B.King quand il était en vie, Muddy Water, Jonhy Hooker, Buddy Guy, Jimmy Reed, Koko Taylor, …

Vous avez également collaboré avec des jeunes comme Ayo et Boosty Collins. Tentez-vous de dépoussiérer un peu ce style pour toucher plus de jeunes ?

Oui, disons que nous essayons de mettre un peu à jour le style musical du blues et le rendre à l’heure du jour.