États-Unis/Iran: L’alliance des faucons
Mireille Duteil

Attention danger ! les tambours de la guerre roulent déjà au Moyen-Orient après la décision de Donald Trump, le 8 mai, de se retirer de l’accord sur le nucléaire iranien signé si difficilement avec Téhéran en juillet 2015. Les faucons anti-iraniens ont gagné. On assiste à la traditionnelle alliance des néo-conservateurs «trumpistes» et du Likoud de Benyamin Netanyahou rejoints, aujourd’hui, par l’Arabie Saoudite et les Émirats. Pas question pour eux de permettre à l’Iran de se moderniser, de devenir « présentable » et de réintégrer le concert des nations, ce qui était, avec l’interdiction de la production d’uranium, le but de l’accord de 2015. Donald Trump parie, comme Netanyahou, que de nouvelles sanctions feront tomber le régime. Quitte à y aider par des coups de boutoir guerriers. Une erreur majeure dans un pays aussi nationaliste.

Le scénario s’est mis en place ces derniers jours, lorsque Tel-Aviv et Washington ont tenté de faire croire que l’Iran avait repris la production d’uranium enrichi. Ne les ont cru que les convertis de longue date. On se croyait revenu quinze ans en arrière lorsque les Américains découvraient les «bombes nucléaires» cachées de Saddam Hussein qui allaient leur permettre de casser l’Irak. Aujourd’hui, c’est l’Iran qui est visé. Et Netanyahou qui, derrière Trump, est à la manœuvre. Depuis un an, militaires israéliens et iraniens se testent, par missiles interposés visant, les uns, les « bases iraniennes » en Syrie, les autres, le nord d’Israël voire l’Arabie Saoudite à partir du Yémen. Personne ne veut commencer l’affrontement, mais on pousse l’autre à la faute.

Le 9 mai, Tsahal a, une nouvelle fois, bombardé une base syrienne, tuant une quinzaine de militaires dont huit membres d’Al-Qods, les forces spéciales iraniennes. Israël craint l’installation d’Iraniens en Syrie le long de sa frontière nord. Netanyahou est convaincu qu’un affrontement est inévitable avec l’Iran. «Mieux vaut maintenant que plus tard», a-t-il déclaré récemment pour préparer l’opinion publique à un conflit, estimant que les Iraniens sont aujourd’hui plus faibles qu’ils ne le seront dans un an. Le 9 mai à l’aube, il s’est envolé pour Moscou pour « s’assurer de la continuité de la coordination entre l’armée russe et Tsahal ».

Est-ce un bluff de la part de Netanyahou ? Difficile à dire tant l’«après 8 mai» laisse découvrir un paysage diplomatique dévasté. Trump a marginalisé ses alliés de tou- jours (la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne) et fait éclater la solidarité atlantique. Il s’érige aussi en gendarme économique du monde imposant à toutes les entre- prises le respect des sanctions qu’il applique à l’Iran, sous peine de se voir priver de marché américain et imposer d’énormes pénalités financières.

Que vont donc faire les cinq signataires de l’accord de Vienne (Russie, Chine) et les trois Européens (France, Grande-Bretagne, Allemagne), qui refusent le diktat américain? «L’accord n’est pas mort» déclare-t-on à Paris. Les Européens vont donc se concerter avec Hassan Rohani pour permettre la survie de leur entente et éviter qu’en Iran, les ultras, opposés à l’accord, ne l’emportent. Vont-ils réussir à contrer l’entente des faucons de tous bords et leurs tentations guerrières ?