Libre cours
Naim KAMAL

18 JUIN 2013, lors d’une conférence de presse à l’occasion de la présentation des décisions du conseil de l’institution qu’il dirige, Abdellatif Jouahri, wali de Bank Al Maghrib, n’a pas hésité un seul instant à dire au gouvernement quelques vérités, à savoir les incidences de la crise de la majorité sur l’image intérieure et extérieure du Maroc. Peu lui importait que cela fasse plaisir aux deux argentiers du pays, Nizar Barka, ministre des Finances et de l’économie, et Driss Al Azami, ministre délégué au Budget. Après tout, le premier aurait pu être son élève et le second a été son subalterne. Ce que le wali de Bank Al Maghrib a dit est le bon sens même.

Les turbulences politiques influent sur la perception que les agences internationales de notation et les organismes financiers mondiaux ont d’un pays. Elles peuvent aussi pousser les investisseurs nationaux et internationaux à une certaine prudence dont le Maroc se passerait bien dans la conjoncture actuelle. C’ÉTAIT UNE ÉLÉGANTE INVITATION à la retenue que le gouvernement aurait pu très mal prendre, surtout du côté du PJD. Similaire sortie de Jouahri avait déjà par le passé provoqué le courroux d’un Azami qui avait invité le wali à se mêler de ses affaires. On pouvait donc craindre le pire cette foisci d’autant plus que tout le monde semble à bout de nerfs.

C’est peut-être l’effet de l’excès d’énergie déployée à conjurer la crise de la majorité, mais c’est bizarrement le silence radio qui a accueilli la prise de position de Jouahri. A moins que les ministres islamistes n’aient commencé à apprendre que la meilleure façon de ne pas faire de l’écho à quelque chose c’est encore de ne pas en parler trop. LA SEULE VOIX DISCORDANTE est venue des rangs de l’opposition. Le député et constitutionnaliste Hassan Tarik n’a pas trouvé l’attitude du patron de la Banque centrale à son goût ni conforme à la constitution. En substance, un « technocrate » est fait, aux yeux de ce jeune député, pour travailler et se taire.

Ça aurait été concevable s’il s’était agi de n’importe quel technocrate, et encore ce ne serait pas très démocratique. Dans le cas de Abdellatif Jouahri, on est en présence d’un des gardiens du temple des finances nationaux. Il a l’oeil sur tous les clignotants et son devoir premier est de lever le drapeau dès que l’un d’eux vire à l’orange ou passe carrément au rouge. Au-delà, la position de Tarik manque d’une certaine intelligence politique. Tout bon opposant aurait profité de l’aubaine que lui a offerte sur un plateau d’argent le banquier du royaume pour ferrailler contre le gouvernement. Parce qu’à mon sens et jusqu’à nouvel ordre, un opposant est fait pour s’opposer. оптимизация страниц сайта