Grève à Hollywood. Meryl Streep soutient les acteurs

Plusieurs stars du cinéma comme Meryl Streep, Ben Stiller ou Colin farrell soutiennent la grève des acteurs contre les patrons d'Hollywood, après l'échec des négociations entre les grands studios américains et le puissant syndicat des acteurs, qui a dénoncé des propositions salariales "insultantes".
« Le conseil national du SAG-AFTRA a voté hier à l’unanimité un ordre de grève contre les studios et les diffuseurs », a annoncé Duncan Crabtree-Ireland, le directeur exécutif national de ce syndicat qui représente 160 000 acteurs et autres professionnels du petit et grand écran.
"Les grandes stars ont des contrats individuels en plus du contrat syndical (...) mais restent néanmoins membres du même syndicat", rappelle à l'AFP Jonathan Handel, avocat spécialisé dans l'industrie du divertissement. Et qui dit même contrat, dit mêmes obligations. Elles vont devenir un porte-voix essentiel, "mais cette grève n'a pas pour but d'apporter plus d'argent à des personnes qui ont déjà des millions", explique J. Handel. Le mouvement social est crucial pour la multitude d'acteurs, bien moins payés, qui doivent "continuer à mettre de la nourriture sur la table et garder un toit au-dessus de leur tête."
Les acteurs rejoignent ainsi le mouvement des scénaristes, déjà en grève depuis plus de deux mois. Les deux corps de métiers revendiquent principalement une revalorisation de leurs rémunérations, en recul depuis la suprématie du streaming. Ils veulent aussi obtenir des garanties concernant l’usage de l’intelligence artificielle (IA), pour l’empêcher de générer des scripts, ou de cloner leur voix et leur image.
Tournages à l’arrêt
La grève doublée des scénaristes et acteurs d’Hollywood constituer la pire paralysie du secteur en plus de 60 ans.
« C’est un moment historique, a affirmé l’ex-star de la série Une nounou d’enfer. Si nous ne nous levons pas maintenant … nous risquons tous d’être remplacés par des machines et de grandes entreprises qui se préoccupent plus de Wall Street que de vous et de votre famille. »
Depuis mai, les seules productions qui tournent encore se basent sur des scripts terminés au printemps, sans pouvoir les modifier, comme le cas du préquel du « Seigneur des Anneaux », « Les Anneaux de Pouvoir ». Mais sans comédiens, les tournages sont à l’arrêt.
A part quelques « talk-shows » et émissions de téléréalité qui se poursuivent, tout le reste est presque inexistant. Les acteurs ont aussi le pouvoir de geler la promotion des blockbusters attendus en salle cet été, comme « Oppenheimer » ou « Gran Turismo ». Et sans tapis rouges, la cérémonie des Emmy Awards prévue le 18 septembre prochain risque d’être reportée.
Conditions précaires des acteurs
L’industrie cinématographique va mal aux USA et les acteurs le font savoir haut et fort depuis un moment déjà. Fin juin, des centaines de comédiens célèbres, comme Meryl Streep, Ben Stiller ou Jennifer Lawrence, ont signé une lettre où ils affirment que leur industrie est à un « point d’inflexion sans précédent ».
Il faut rappeler qu'à Hollywood, 90% des acteurs galèrent. A 40 ans, Dominic Burgess a du mal à joindre les deux bouts. Pour l'acteur britannique qui a vu ses revenus diminuer depuis dix ans, la grève historique des comédiens annoncée jeudi est "essentielle".
Le comédien a joué dans des séries à succès comme "Modern Family", "Star Trek: Picard" ou "Dahmer: Monstre - L'histoire de Jeffrey Dahmer", une production qui vient d'être nommée aux Emmy Awards, l'équivalent des Oscars télévisuels. Et pourtant, même après 15 ans de carrière aux Etats-Unis, sa réalité ne ressemble en rien aux quotidiens des stars à la une de la presse people.
Le minimum syndical peut paraître élevé: un acteur de télévision doit être payé au moins 1.082 dollars par jour sur un tournage. Mais entre l'agent, les frais juridiques et les impôts, la moitié de cette somme s'envole, rappelle M. Burgess.
Et les producteurs peuvent demander à un acteur payé pour juste une ou deux journées de rester disponible pendant des semaines, à cause de l'incertitude du calendrier de tournage.
"C'est assez commun", explique-t-il. "Ces 500 dollars doivent alors durer huit jours, 16 jours ou 21 jours s'il s'agit d'une série prestigieuse. Cela devient insoutenable."
Conséquentes foudroyantes du streaming
De plus, depuis une dizaine d’années, l’avènement du streaming a lourdement impacté les rémunérations « résiduelles » des acteurs et scénaristes, découlant de chaque rediffusion d’un film ou d’une série. Ces derniers estiment être "lésés" car les plateformes de streaming qui ne communiquent pas leurs chiffres d’audience les paient un forfait dérisoire, indépendamment du succès du produit diffusé contrairement à la télévision où ces rémunérations sont calculées en fonction du tarif des publicités.
Sans ces revenus essentiels pour absorber les périodes d’inactivité entre deux productions, plusieurs travailleurs qui ne disposent pas d’un statut d’acteur ou auteur star s’insurgent contre une précarisation de leur métier. « Quand le patron de Disney gagne 45 millions de dollars par an et que nous demandons juste un salaire décent, je pense que ce sont eux qu’on peut accuser d’être déraisonnables », s’est indignée l’actrice syndiquée Jennifer Van Dyck.
Studios et plateformes ont également de plus en plus recours à d'autre mesures d'économie, comme rétrograder les acteurs de catégorie d'embauche officielle ("series regular", "recurring guest star", etc.) pour moins les payer.
(Avec AFP)