
La Syrie n’est pas la Libye et ni le Mali. Il ne s’agit donc pas de comparer les situations, mais la frilosité et les atermoiements occidentaux, en particulier des populations américaines et européennes, face au drame syrien, sont consternantes. Ils montrent la grande incompréhension qui s’accroît entre le nord et le sud de la Méditerranée. Les « printemps arabes », l’arrivée au pouvoir des islamistes, le reflux actuel de l’islam politique, donnent le tournis en Occident. Les téléspectateurs surinformés et mal informées – les deux marchent de pair – n’y comprennent plus rien. Les Syriens en font les frais. François Hollande et Barak Obama l’ont bien compris.
Cette fois, ils n’entendent pas rester les bras croisés devant le nouveau massacre, à l’arme chimique, du 21 août qui a éliminé un millier de Syriens dont une majorité de femmes et d’enfants, près de Damas. Ne rien faire, c’est, pour les Américains, accepter de se décrédibiliser totalement. Voilà plus d’un an que Barak Obama annonce que l’emploi d’armes chimiques sera une ligne rouge. Elles ont déjà été employées par le régime de Damas, et certains affirment que des groupes rebelles possèdent aussi du gaz sarin. Il semble néanmoins que faute de lanceurs, les rebelles ne peuvent être accusés du massacre du 21 août. Ne rien faire, c’est aussi entériner le fait qu’un dictateur peut gazer sa population sans conséquence. Demain, un autre despote pourra les employer contre son peuple en espérant ne rien risquer.
Qu’espèrent Washington et Paris ? Renverser Bachar el-Assad ? Personne ne croit que des frappes ciblées sur des aéroports, des casernes, des batteries lance-missiles…. puissent faire tomber le régime. Sauf si elles poussaient des militaires à agir à l’intérieur de l’armée. Les Occidentaux ont longtemps attendu ce moment, mais les services de sécurité aux mains du frère de Bachar el-Assad, Maher, et de ses proches, tiennent apparemment bien le système. L’objectif est d’obliger Assad à négocier une sortie politique du conflit. Aujourd’hui comme hier, l’issue du conflit est entre les mains de Vladimir Poutine et du Guide iranien. Pour l’Iran qui se bat par Hezbollah interposé, la Syrie est un enjeu stratégique. Elle lui permet de ne pas être isolé dans la région face à l’Arabie Saoudite et aux Américains. Que veut Poutine ? A la veille du G20 de Saint Pétersbourg, jeudi et vendredi, il fait mine de lâcher du lest.
Qu’on lui apporte la preuve que des armes chimiques ont été utilisées, et il lèvera son veto au Conseil de sécurité. Il déclare aussi qu’il a cessé de livrer, à Damas des pièces détachées des batteries sol-air S300, l’équivalent des Patriot américains, qui seraient un danger en cas de bombardements américains et français. Le nouveau tsar russe espère parvenir à un marchandage lors du G20. Il ne veut pas d’une victoire des rebelles mais est prêt au départ d’el-Assad. Les Occidentaux ne veulent surtout pas des djihadistes demain en Syrie, les Américains accepteraient une transition avec des hommes en place. Paris ne veut pas que le Conseil national syrien (l’opposition syrienne) soit le grand perdant d’un marchandage. Tout reste ouvert. Y compris les frappes, avec ou sans accord du Conseil de sécurité. Avec ou sans aval des Parlements. Les deux constitutions, américaine et française, donnent ce feu vert à l’exécutif.