Oléagineux. La souveraineté nationale en question (vidéo)
Le Maroc a un énorme potentiel dans la production des oléagineux

La filière des produits oléagineux dépend largement des importations pour ses approvisionnements en matières premières. La volatilité des prix relance le débat sur l'autonomie de la filière. L’heure est au développement de la production au niveau local afin d’améliorer la souveraineté nationale.

Le Maroc importe la quasi-totalité de ses besoins de matières premières dans la filière des produits oléagineux. Selon Hassan Benabderrazik, cofondateur et directeur général d’Agroconcept, les prix des matières premières ont atteint leur plus haut niveau depuis 2014. « Le cours du soja a augmenté de 80%, celui du tournesol est passé à 90% », constate-t-il. D'où une surenchère sur les coûts des importations au Maroc.

A titre indicatif, les besoins moyens du Maroc sont de l'ordre de 1,08 million de tonnes de tourteaux et 756.000 tonnes d'huiles de graines. Au cas où la hausse actuelle des prix de ces produits se maintenait, le surcoût sur la balance commerciale pourrait être de plus de 3 milliards de DH.

Solution ? «Il faut développer les filières de production d'oléagineux afin d'améliorer la souveraineté nationale en huiles et protéines végétales », clament à l’unisson experts et professionnels.


Perspectives prometteuses

Dès 2009, les pouvoirs publics ont placé la relance de la filière oléagineuse marocaine comme un objectif essentiel du Plan Maroc Vert. La signature du contrat-programme en 2013 entre le gouvernement et l'interprofession marocaine (FOLEA) a permis de déployer les moyens nécessaires au développement de cette filière. C’est sur cette base que les surfaces cultivées en tournesol et colza se sont élargies de plus de la moitié entre 2013 et 2020, atteignant 40.000 hectares.

Dans la continuité du Plan Maroc Vert, la stratégie Génération Green ambitionne d’atteindre 80.000 hectares de colza (30.000 Ha) et de tournesol (50.000 Ha) à l’horizon 2030. A terme, cela permettra de couvrir 15% des besoins du marché marocain contre seulement 1,7% en 2019.

« Le monde agricole marocain peut tirer plusieurs avantages de l’intégration des cultures oléagineuses. Ces dernières participent à stabiliser et à améliorer les revenus des agriculteurs », affirme Hassan Benabderrazik. Ce dernier rappelle que ces cultures contribuent à la structuration du monde agricole à l’échelle territoriale, à travers l’émergence de coopératives et d’entrepreneurs agricoles, renforçant ainsi le tissu socio-économique rural.

Le Programme Maghreb Oléagineux, initié par Terres Univia et cofinancé par l'Union européenne, a pour mission d’accompagner le développement de la filière marocaine de colza et de tournesol. « Il promeut l’adoption de pratiques agricoles durables et l’utilisation de semences produites en Europe, aidant ainsi à l’amélioration des performances des exploitations marocaines. Le Programme s’inscrit pleinement dans la stratégie agricole du Maroc, Génération Green », explique Guénaël Le Guilloux, représentant de Terres Univia.

De son côté, Jean-Louis Rastoin, professeur honoraire à Montpellier SupAgro et membre de l’académie d’agriculture de France souligne le rôle majeur que devront jouer les oléagineux et les légumineuses dans l’évolution en cours vers des systèmes alimentaires territorialisés durables.

Pérenniser les acquis du Plan Maroc Vert

Les systèmes de production et les pratiques culturales doivent évoluer pour limiter les impacts des difficultés croissantes que connaît le secteur. Pour Mohammed Saidi, Directeur de la Fédération Nationale Interprofessionnelle des Semences et Plants (FNIS), « la diversification et l’allongement des rotations est l’une des mesures clé à adopter. Les cultures oléagineuses sont adaptées aux conditions agropédoclimatiques du sol céréalier du Maroc. Elles sont également reconnues comme essentielles pour améliorer les performances et la durabilité des exploitations ».

Et Saidi d’ajouter : « la stratégie Génération Green permettra de consolider et pérenniser les acquis du Plan Maroc Vert et de poursuivre la structuration du secteur en encourageant dans les territoires ruraux l’essor d’organisations agricoles et d’entrepreneurs. Ces activités génératrices d’emplois et de revenu bénéficieront notamment aux jeunes et permettrons l’émergence d’une classe moyenne agricole. La filière oléagineuse jouera un rôle important dans cette dynamique socio-économique et pour le renforcement de la résilience de l’agriculture marocaine face au changement climatique ».