Bilan gouvernemental. Peut mieux faire
100 jours de gouvernement. Du bon, du moins bon

Le chef du gouvernement, Aziz Akhannouch a présenté le bilan des 100 premiers jours du gouvernement qu’il dirige. Il y a des réalisations, certes, mais aussi quelques mots insuffisances.



«Nous sommes en train d’honorer nos engagements vis-à-vis des Marocains », déclare Aziz Akhannouch lors de la présentation du bilan de ses 100 premiers jours à la tête du gouvernement. Le chef de l’exécutif a mis l’accent sur différentes réalisations à commencer par la gestion de la pandémie du coronavirus. Sur ce volet, Il estime que « la décision de fermer les frontières était judicieuse face à l’absence en ce moment de données précises sur le variant Omicron ».

Sur une éventuelle réouverture des frontières, il souligne que « cette question est en cours d’examen afin d’opérer une relance du tourisme ».Interpellé sur la hausse des prix, et l’impact sur le pouvoir d’achat, le chef du gouvernement souligne que l’inflation au Maroc est maîtrisée. Selon lui, les prix de certains produits de base sont stables, comme les légumes, les fruits et les viandes..., mais il reconnait que le pétrole et d’autres produits de base connaissent une hausse des prix compte tenu des fluctuations du marché international, et cette situation, pour lui, reste conjoncturelle au regard des effets de la pandémie.

Un bilan mitigé

Pour l’analyste économique Rachid Sari, « le bilan présenté indique qu’il y a certes une volonté d’aller de l’avant, mais, la volonté ne suffit pas. Il faut instaurer des mesures audacieuses pour redémarrer la machine économique et soutenir encore plus les secteurs sinistrés ».

De son côté, le directeur du laboratoire des recherches juridiques et analyse des politiques à l’université Cadi Ayyad de Marrakech Mohamed Elghali, estime que le gouvernement n’est pas tenu de présenter un bilan axé sur les chiffres. « Il aurait fallu mettre l’accent sur le qualitatif plutôt que sur le quantitatif », insiste-t-il.

Pour le politologue, le travail du gouvernement doit s’inscrire normalement dans la trajectoire du nouveau modèle de développement. Or, « ce modèle a un cadre référentiel basé sur la mise en place d’un système de valeurs, notamment la transparence, la qualité, l’efficience, l’efficacité, la performance » relève-t-il. Selon lui, le défi est de construire ce système de valeurs et trouver des solutions concrètes pour les différents maux actuels ». Constant qu’aujourd’hui, le gouvernement est toujours à la case départ, le politologue conseille de « mettre le turbo ».

Des réalisations mais...

Rachid Sari, rappelle que la loi de finances 2022 s’est focalisée sur trois secteurs principaux : la santé, l’éducation et l’emploi. «Bon nombre d’initiatives louables ont vu le jour au cours de ces 100 premiers jours illustrant ces orientations notamment le lancement des programmes "Awrach" et "Forsa", le plan d’urgence pour le tourisme pour sauvegarder les emplois et encourager les investissements, le chantier de la protection sociale... », assure l’économiste.

Au-delà des réalisations, des insuffisances sont aussi relevées. On reproche au gouvernement un déficit flagrant en matière de communication. Sur ce volet, le chef du gouvernement réplique que l’exécutif a tenu 14 Conseils de gouvernement et a interagi avec 22 séances de questions orales, en plus de l’organisation d’autres réunions au parlement consacrées à de nombreuses questions. Il estime que les aspirations des Marocains sont immenses et qu’ils veulent voir des résultats plus que les sorties médiatiques du chef du gouvernement. A. Akhannouch assure par ailleurs que le gouvernement s’adressera aux médias « chaque fois qu’il sera nécessaire d’expliquer au citoyen les mesures prises ».

Autre reproche, l’absence de mesures concrètes pour le monde rural. «Le gouvernement sera confronté certainement à une année de sécheresse d’où la nécessité d’accorder une attention particulière à la campagne. D’autant plus que les agriculteurs font face à une double peine : la sécheresse et la flambée des prix des aliments pour le bétail. Malheureusement, rien de concret dans ce sens», déplore Elghali. Sari quant à lui, met l’accent sur le secteur du tourisme, estimant que ce qui a été décidé pour le soutien de cette activité, reste insuffisant compte tenu des pertes subies suite à la fermeture des frontières et de l’importance de ce secteur dans le PIB national (10%).

La TPE, la grande oubliée ?

D’après le président de la confédération des TPE/PME, Abdellah El Fergui, la TPE ne figure pas en tête des priorités de l’actuel gouvernement. «Un ministère dédié aux petites entreprises a été certes mis en place par l’exécutif. Mais malheureusement, on constate qu’il n’y aucun programme concret, ni vision claire, ni encore de moyens dédiés pour venir en aide aux millions des TPE-PME et auto-entrepreneurs qui constituent plus de 95% du tissu économique du Maroc et qui sont les 1ers employeurs du Royaume », regrette El Fergui ajoutant que le département concerné accorde une attention particulière à la création de l’emploi mais ne se soucie guère de préserver les emplois déjà existants, menacés de disparaitre aujourd’hui en l’absence urgentes».

Autre constat relevé : «ce nouveau gouvernement veut exclure des millions de TPE et autoentrepreneurs des services de « l'Agence Nationale de Soutien aux Petites et Moyennes Entreprises ‘’ (Maroc PME) sans aucune alternative. Cette agence va s’occuper seulement de presque 30.000 PME alors que 4 millions des TPE seront laissés à leur propre sort », déplore encore El Fergui qui appelle à la création d’une agence nationale pour le soutien et l’accompagnement des TPE (Maroc TPE).

Concernant le programme Intelaka, le président de la confédération des TPE/PME met l’accent sur le retard dans le traitement des dossiers ayant atteint dans certains cas plus de 18 mois et du taux important de rejet des dossiers sans justificatif. Il critique aussi la loi de finances 2022, qui pour lui, n'apporte aucune solution pour les difficultés auxquelles sont confrontés lesTPE-PME et n’accorde aucune attention à cette catégorie d'entreprises fortement impactée par la crise sanitaire. L’une des problématiques majeures soulevées par le même interlocuteur, le retard des paiements. «Un total de 13 milliards de dirhams (MMDH) a été mobilisé pour rembourser les arriérés des crédits de la TVA au profit des entreprises surtout les grandes. Malheureusement, les TPE n’ont pas été concernés », tient à souligner Fergui qui appelle le gouvernement à prendre les mesures adéquates pour contraindre le secteur public et les grandes entreprises privées contractantes à payer les créances vis-à-vis des TPE et PME