Turquie. Osman Kavala, quatre ans en prison... sans jugement
Osman Kavala. Erdogan risque de lourdes sanctions

Le mécène turc Osman Kavala, détenu depuis plus de quatre ans sans jugement, restera en prison, a décidé lundi un tribunal d'Istanbul malgré la menace de sanctions du Conseil de l'Europe qui pèse sur Ankara.

La cour s'est brièvement retirée avant d'annoncer sa décision au terme d'une audience éclair lundi matin, en l'absence de l'intéressé, a constaté l'AFP.

Figure majeure de la société civile, l'éditeur et philanthrope Osman Kavala, 64 ans, est accusé par le régime du président Recep Tayyip Erdogan d'avoir cherché à déstabiliser la Turquie. Il risque la prison à vie.

Outre l'épouse de O. Kavala, plusieurs diplomates européens - français et allemand notamment - et américain étaient présents au tribunal, ainsi que le rapporteur du Parlement européen pour la Turquie, Nando Sanchez Amor, a constaté l'AFP. Ankara est sous la menace de sanctions du Conseil de l'Europe pour maintenir cet intellectuel en détention sans jugement.

Depuis 2019, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) réclame sa remise en liberté et début février, le Conseil de l'Europe a de nouveau saisi cette juridiction.

La procédure d'infraction, qui traîne en longueur, pourrait entrainer pour la Turquie la perte de son droit de vote, voire son expulsion de cet organe auquel elle a adhéré en 1950. Mais la Turquie dénonce une "atteinte à l'indépendance de la procédure judiciaire".

"Difficile de comprendre pourquoi la Turquie ne se plie pas aux injonctions de la Cour alors qu'elle est partie prenante de cette juridiction, parce qu'elle n'échappera pas aux conséquences" a indiqué à l'AFP le rapporteur du Parlement européen.

"La Turquie est membre fondateur (du Conseil de l'Europe), il ne s'agit donc pas d'une ingérence étrangère" a insisté Nando Sanchez Amor, estimant que cette attitude "nuit à l'image du pays."

Détenu depuis 1.574 jours à la prison de Silivri, près d'Istanbul, Osman Kavala - surnommé le "milliardaire rouge" par la presse pro-gouvernementale - est dans le viseur du pouvoir pour avoir soutenu en 2013 les manifestations antigouvernementales contre Erdogan, alors Premier ministre. Son cas est devenu emblématique depuis qu'à l'automne une dizaine d'ambassadeurs ont réclamé sa libération, déclenchant une crise diplomatique.

En représailles, le président turc les avait menacés d'expulsion avant de se rétracter.

Avec AFP