Aux dernières nouvelles, une bonne partie des grévistes dans les raffineries de TotalÉnergies en France vont poursuivre leur mouvement de protestation. Les Français vont donc continuer à avoir du mal à s’approvisionner en carburants chez les pompistes. Cette situation a fait courir des bruits sur un éventuel détournement par TotalÉnergies vers la France de cargaisons de gasoil et d’essence que sa filiale marocaine destinait, initialement, aux consommateurs marocains.

«TotalEnergies acheminerait en France le stock de carburant destiné au Maroc», titrait le 17 octobre notre confrère Maroc Diplomatique. Cette grave accusation n’a pas été démentie par TotalÉnergies Maroc. Le silence semble être sa seule politique de communication. Or, ce black-out devient insultant au vu de la gravité du scandale dont ont été directement victimes près de deux cents utilisateurs marocains à cause de la mauvaise qualité du carburant de cette société, selon des témoignages de certaines de ces victimes recueillies par notre confrère HibaPress et publiés le 3 octobre sur sa chaîne YouTube.

De quoi s'agit-il ?

Après s’être approvisionnés en gasoil, au cours des derniers jours du mois de septembre dernier, auprès de pompistes du réseau de TotalEnergies Maroc à Deroua et à Médiouna (Région de Casablanca-Settat), des conducteurs, des chauffeurs de grands taxis en majorité, ont eu la désagréable surprise de voir leur véhicule tomber aussitôt en panne. D’importants dégâts ont été constatés au niveau notamment des pistons et de la pompe à gasoil. Parmi les garagistes consultés par les malheureux clients, certains ont vite relevé la présence d’eau dans le réservoir mélangée au carburant.

Il a fallu que de nombreuses victimes se rassemblent devant les stations à problème d’où ils s’étaient approvisionnés et manifestent leur colère pour que TotalEnergies Maroc fasse les pieds et les mains pour étouffer l’affaire.

Selon des témoignages concordants recueillis par L’Observateur du Maroc, un bon d’achat de 1500 DH aurait été remis à des chauffeurs de taxi, les plus remuants parmi les victimes. Quelques bons de réparation ont été également signés par les assureurs des stations concernés à certains plaignants. Toutefois, le scandale n’a pas été pour autant étouffé. Il a d’ailleurs fait sortir de ses gonds l’Union marocaine des associations de protection des consommateurs au Maroc. Basée à Agadir, cette ONG a appelé au boycott des stations Total en s’indignant du manque de considération dont font preuve des prestataires de services français à l’encontre des Marocains. Le communiqué a évoqué comme autre exemple le mépris dont font preuve les consulats français envers les demandeurs de visas marocains qui payent des visas refusés sans pouvoir se défendre.

On peut désapprouver le ton vindicatif de l’auteur du communiqué, mais le mépris qu’il dénonce est avéré. C’est le même qui ressort du silence de TotalEnergies Maroc qui puise d’énormes dividendes du marché marocain sans daigner ni s’excuser auprès de ses clients à Mediouana, à Deroua et ailleurs, puisque d’autres cas ont été signalés à Béni Mellal, ni même s’expliquer sur ce qu’il s’était réellement passé.

Le même black-out a été constaté après la publication du dernier rapport du Conseil de la concurrence. Ce document montre clairement que la filiale marocaine de la société pétrolière française figure parmi les pétroliers qui engrangent le plus de bénéfices et investissent le moins. Le scandale du mauvais gasoil proviendrait-il de ce sous-investissement ?

Pourquoi c'est grave ?

Le silence total de TotalEnergies Maroc est inadmissible parce qu’il est l’expression du regard hautain qu’ont certains politiques et hommes d’Affaires français. Ces derniers continuent à voir le Maroc comme une vache à lait tout juste bonne à traire et les Marocains des clients de seconde zone.

En France, la maison mère de TotalEnergies Maroc communique à l’excès pour donner les réponses nécessaires à toutes les questions que posent les consommateurs locaux et même à celles qu’ils ne posent pas, au point de tomber dans le mensonge. C’est pour cela que «Greenpeace», «Les Amis de la Terre» et «Notre Affaire à tous», soutenues par l’association caritative spécialisée dans le droit et l’environnement ClientEarth, avaient traîné, le 2 mars dernier, TotalEnergies devant la justice. Ces ONG lui reprochent de recourir à des «pratiques commerciales trompeuses» et se battent pour faire reconnaître par la Justice française le caractère mensonger des publicités de cette entreprise. Celle-ci prétendait pouvoir atteindre la neutralité carbone d’ici à 2050. Mais c’est une autre histoire et il y en a bien d’autres tout aussi scandaleuses...

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