Ajay Banga: "Les pays du Sud paient le prix de la prospérité des autres"
Ajay Banga, président de la banque mondiale.

Dans son premier grand discours depuis son entrée en fonction, le président de la banque mondiale Ajay Banga, a mis l’accent sur la gravité de la situation actuelle et a appelé à une action collective pour façonner un avenir meilleur et plus durable pour tous.

A l’issue de la plénière de l'Assembléeannuelle 2023, le président de la banque mondiale Ajay Banga a d’abord plantéle décor : « Le monde est confronté à des forces profondes et à deschangements rapides. Nous sommes confrontés à un déclin des progrès dans notrelutte contre la pauvreté, à une crise climatique existentielle, à l’insécuritéalimentaire, à la fragilité, à une reprise pandémique naissante et ressentonsles effets des conflits au-delà du front », lance t-il d’emblée.

Les temps sont difficiles

Les chiffres évoqués sont alarmants : «La croissance économique recule dans une grande partie du monde en développement. En baisse de 6 pour cent à 5 pour cent en deux décennies, et en bonne voie pour seulement 4 pour cent au cours des 7 prochaines années », alerte Ajay Banga. Il ajoute aussi que « pour chaque pourcentage perdu, 100 millions de personnes sombrent dans la pauvreté et 50 millions de personnes supplémentaires sombrent dans l’extrême pauvreté ».

Pendant ces temps, Ajay Banga estime que la dette a augmenté dans tous les marchés émergents, elle a même doublé en Afrique. « Sous la surface, une méfiance croissante divise le Nord et le Sud, compliquant les perspectives de progrès. La frustration des pays du Sud est compréhensible. À bien des égards, ils paient le prix de la prospérité des autres », souligne t-il précisant «que les pays du Sud craignent que les ressources promises ne se manifesteront jamais, ils estiment que les règles énergétiques ne sont pas appliquées universellement et ils craignent qu’une génération émergente ne soit enfermée dans une prison de pauvreté ».

Que faire alors ? «Nous devons être une institution qui exporte l’optimisme et l’impact », insiste Ajay Banga. Mais, pour se faire «nous devons changer pour tenir cette promesse et répondre à nos attentes ».

Nouvelle vision, nouvelles ambitions

« La Banque mondiale a aujourd’hui une nouvelle vision et une nouvelle mission : créer un monde sans pauvreté, sur une planète vivable qui stimulera un développement efficace et conduira à une meilleure qualité de vie – accès à l’air pur, à l’eau potable, à l’éducation et à des soins de santé décents», révèle Ajay Banga précisant que « c'est une mission qui inclut tout le monde, y compris les femmes et les jeunes, résilient aux chocs, notamment aux crises climatiques et de biodiversité, aux pandémies et à la fragilité et durable, grâce à la croissance et à la création d’emplois, au développement humain, à la gestion des finances publiques et de la dette, à la sécurité alimentaire et à l’accès à l’air pur, à l’eau et à une énergie abordable.

Banga reconnait que l’urgence et l’importance ne peuvent être surestimées. « Nos propres estimations prévoient qu’au cours des 10 prochaines années, 1,1 milliard de jeunes dans les pays du Sud deviendront des adultes en âge de travailler. Pourtant, sur la même période et dans les mêmes pays, nous ne devrions créer que 325 millions d’emplois »,

Le travail a déjà commencé avec la création d’un mécanisme de garantie de portefeuille et le lancement d’un instrument de capital hybride. « Ces nouveaux outils nous permettent de prendre davantage de risques et d’augmenter encore notre capacité de prêt, tout en préservant notre notation AAA. Ensemble, nous pourrions fournir 157 milliards de dollars supplémentaires en capacité de prêt sur une décennie », fait savoir Banga qui appelle les gouvernements et les organismes philanthropiques à accroitre leurs ressources à des conditions concessionnelles. « Avec cette plus grande ambition et cette capacité à remplir notre nouvelle mission, nous pensons qu’il s’agira d’un véritable « Fonds Livable Planet », affirme le président de la banque mondiale, avant de conclure « Si nous voulons vraiment encourager le changement, nous ne pouvons pas simplement le souhaiter, nous devons nous battre pour cela ».