PROCHE-ORIENT: L’occasion manquée de François Hollande
Mireille DUTEIL

François Hollande devrait se méfier. L’avalanche de compliments reçus en Israël de la part de la droite et de l’extrême droite du gouvernement, n’est pas vraiment bon signe. Que le Premier ministre Benyamin Netanyahou lui déroule le tapis rouge est assez logique. En froid avec Barack Obama, Netanyahou a un souci : que les 5+1 (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Grande-Bretagne et Allemagne) ne signent pas un accord avec l’Iran sur le nucléaire qui entraînerait une levée partielle des sanctions économiques et financières. Or la France a fait capoter l’accord qui était en préparation lors du premier round des négociations, à Genève, début novembre. Netanyahou compte sur sa fermeté pour le second round à partir du 20 novembre. Président socialiste, François Hollande est un ami d’Israël depuis toujours. Sur l’Iran, il a enfourché les positions de son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, les a même durcies, faisant le choix de l’Arabie Saoudite contre l’Iran.

Aussi, rien d’étonnant à ce que ce Président adepte de la synthèse, ait, à la fois, rassuré Israël sur sa politique tout en se déclarant ami des Palestiniens, ce qui n’est pas faux. Mais tenir le même langage à Ramallah et à la Knesset à Jérusalem, à savoir que « la colonisation doit cesser car elle compromet la solution de deux Etats », palestinien et israélien, est bien. Mais c’est le service minimum. Sans compter que Paris sait pertinemment que ni Netanyahou, ni le ministre des Affaires étrangères, Avigdor Lieberman, entre autres, ne veulent d’un Etat palestinien. Or la France, comme l’Europe et les Nations Unies répètent que la colonisation est illégale, mais tous semblent mettre les deux pays sur un même pied. Or entre l’occupant et l’occupé, il n’y a pas d’égalité, et sembler l’oublier n’est pas faire preuve de justice. L’un, Israël, a la force, l’armée, et les 500.000 colons installés en toute illégalité en Cisjordanie et à Jérusalem-Est. L’autre, la Palestine, n’a pas d’Etat mais un territoire morcelé par les colonies, les checkpoints, le manque d’eau captée pour les implantations et les humiliations des soldats israéliens qui peuvent venir arrêter qui ils veulent, quand ils le veulent.

Il est dommage que François Hollande n’ait pas profité de sa position d’ami d’Israël pour rappeler le blocus de Gaza, l’obligation pour un Etat palestinien d’avoir un Etat dans les frontières de 1967, un libre accès à ses ressources en eau, la nécessité de trouver une solution au problème des réfugiés... Les derniers en date sont les dizaines de milliers de réfugiés palestiniens de Syrie qui ont fui les combats. Le président français n’a pas voulu entrer « dans les détails qui fâchent ». Aussi, son voyage au Proche-Orient risque de ne pas rester dans les mémoires ou alors sera perçu comme une occasion manquée. On se souvient de celui de Jacques Chirac à Jérusalem en 1996 quand il affronte physiquement la sécurité israélienne qui l’empêchait de parler aux Palestiniens dans le Vieille Ville. Il menaça de reprendre l’avion. On se souvient aussi de Mitterrand qui a sauvé, à deux reprises, Yasser Arafat en organisant son départ du Liban, et qu’ensuite, c’est Paris qui pesa pour imposer l’OLP comme représentant du peuple palestinien. C’était quand la France jouait les précurseurs au Proche- Orient et ne craignait pas de sortir des sentiers battus. C’était il y a bien longtemps.