Libre cours
Naim KAMAL

JANVIER DERNIER, GUERCIF a connu son premier festival du cinéma qui porte bien son nom, Rencontre du cinéma de la marge. Je ne doute pas un seul instant, même si je ne leur ai pas demandé leur avis, que ses organisateurs l’ont intentionnellement baptisé ainsi. Comment ne pas avoir une petite pensée pour ce nano festival au moment où commence dans la cité ocre la grande messe de la cinématographie, la 13e édition du Festival International du Film de Marrakech, désormais une Mecque du septième art. Un pèlerinage annuel obligé qui hérisse annuellement et à la même époque le poil des islamistes. L’une des icônes du grand écran, guets star cette année, a été pendant longtemps l’objet de tous les fantasmes. Sharon Stone en chair et en sensualité. S’il se trouve quelqu’un pour ne pas la connaître, Sharon Stone est la vedette, avec Michael Douglas, de Basic Instinc, un thriller érotique qui a fait jaser bien des chastes à sa sortie mais qui a réalisé des recettes qui ont dépassé les trois cent millions de dollars américains.

LE CINÉMA N’A JAMAIS LAISSÉ INDIFFÉRENT et périodiquement il provoque des controverses et des polémiques enflammées. Chez nous en terre d’Islam plus qu’ailleurs. La passion du Christ de Mel Gibson ou Une affaire de femmes de Claude Chabrole. Marock de Leila Marrakchi ou Zéro de Noureddine Lakhmari. Ces films, entre autres, ont suscité des mouvements de colère aveugle. La stigmatisation se focalise invariablement sur l’extrême violence des scènes, le sexe et la religion. Les gardiens du temple et les bodyguard de l’ordre moral peuvent avoir les yeux bleus ou le teint relevé, leurs motivations sont les mêmes, protéger la société contre son gré des germes du mal. Sans jamais penser qu’il y a un moment pour tous les goûts et pour toutes les couleurs, l’achat d’un billet et l’entrée dans une salle de cinéma étant un acte volontaire.

NOS ISLAMISTES ONT MIS DE L’EAU, DISONS DANS LEUR VINAIGRE pour ne pas être sacrilège. Les uns parce qu’ils sont au gouvernement, les autres parce qu’ils se sont rendu compte que leurs campagnes de dénigrement profitaient in fine aux productions ciblées. Malgré tout, le cinéma a continué son bonhomme de chemin. Souvent, avec le soutien du Centre cinématographique marocain, parfois sans. Aujourd’hui, le cinéma national produit des films de qualité et réalise vingt à vingtcinq longs métrages et soixante à quatre- vingt courts métrages par an qui font le bonheur des festivals nationaux et internationaux et quelques jaloux dans les environs. J’évoquais Guercif et Marrakech, mais le Maroc organise annuellement soixante-quatre festivals. On connaît celui de Tanger, un peu celui méditerranéen de Tétouan, mais qui est au courant de la Khayma cinématographique El Aounate – Sidi Bennour ou encore du Festival International du Cinéma et de la Mer de Mirleft. Du documentaire à l’animalier, du cinéma et handicap au cinéma d’auteur, de Tanger à Lagouira, c’est une caravane de films de tout genre, en permanence mobile. N’est-ce pas une chance et un bonheur ?