IRAN Le véritable enjeu de l’accord de Genève

Le plus difficile commence maintenant », tel a été le commentaire de Barack Obama au lendemain de l’accord intérimaire de six mois signé à Genève avec l’Iran. Il doit permettre de neutraliser le stock d’uranium déjà enrichi à 20% par Téhéran et de geler les activités de la centrale à eau lourde d’Arak (fabrication du plutonium). En contrepartie, l’Iran devrait recommencer à exporter des produits pétroliers, de l’or, des métaux précieux et disposer de 7 des 100 milliards d’avoirs gelés à l’étranger. Un tout premier pas. En fait, l’Iran et les Etats-Unis négociaient en secret cet accord depuis mars passé (sous la présidence de Mahmoud Ahmadinejad), à Oman. Leurs partenaires occidentaux, Russie, Chine, France, Grande-Bretagne, l’Allemagne et Israël, n’ont été tenus au courant qu’en septembre dernier. Washington et Téhéran souhaitaient s’entendre sur un texte présenté ensuite aux cinq autres pays pour qu’ils l’entérinent. Ce ne fut pas aussi facile. La France, en particulier, a joué les empêcheurs de tourner en rond à Genève début novembre. Si cet accord est historique, ce n’est pas tant dans son contenu. Il y a dix ans, Hassan Rohani, alors conseiller du président Khatami, avait déjà négocié un arrêt temporaire de l’enrichissement de l’uranium. La nouveauté est qu’aujourd’hui, Américains et Iraniens ont intérêt à parvenir à un accord et à se réconcilier. Barack Obama veut se désengager du Moyen-Orient pour regarder vers l’Asie où se joue le monde de demain. Il ne veut plus d’opérations militaires comme en Afghanistan et en Irak, qui se sont avérées des échecs. Reste la Syrie. Washington veut trouver une solution avec les Russes et non contre eux. Se réconcilier avec Téhéran (meilleur allié de Bacharel- Assad) ne peut que faciliter une solution. Le hasard n’existant pas en politique, force est de constater que l’ONU a trouvé une date (le 22 janvier) pour une conférence sur la Syrie, deux jours après l’accord passé avec l’Iran. Et, à l’exception de Riyad, pas une capitale, même Paris, ne s’offusque à l’idée que Téhéran puisse, éventuellement, y participer. Du côté iranien, cet accord conforte Hassan Rohani. C’est pour lui un succès après quatre mois de présidence. Plusieurs explications à son succès : la situation économique et financière catastrophique de l’Iran, conséquence des sanctions ; le soutien du Guide, l’ayatollah Ali Khamenei ; et, très important, le tropisme américain de l’Iran. Voilà des années que les Iraniens, même Mahmoud Ahmadinejad, rêvent de rétablir des relations avec Washington. Le plus dur était, politiquement, de faire le premier pas. Libéral, Hassan Rohani l’a fait. Se réconcilier avec les Etats- Unis, c’est permettre à l’Iran de sortir de son isolement, de renouer avec la technologie occidentale indispensable pour relancer l’industrie pétrolière et les plans de développement. Pour l’Iranien de la rue, c’est l’espoir de voir se desserrer le carcan religieux. Pour Rohani, c’est peut-être aussi, réussir à mettre au pas les Gardiens de la révolution, cet Etat dans l’Etat, qui tient l’économie du pays. Mais rien n’est encore gagné