Libre cours
Naim KAMAL

LE MAROC A RÉGRESSÉ de quatre rangs dans l’indice de la corruption établi par Transparency International. Du 87e au 91e sur 177 pays. On n’est pas les pires mais on n’est pas les meilleurs. C’est ainsi que la Maroc confirme qu’il est effectivement la Nation du juste milieu. La campagne de communication pour la lutte contre la corruption, comme on le pressentait, c’est avérée infructueuse. Guérir d’un mal pareil par une telle thérapie relèverait du miracle de la même manière que se rétablir d’un cancer appartiendrait à l’univers du prodige. On n’éradique jamais totalement la corruption. Transparency International qui a publié mardi 3 décembre un état des lieux suffisamment exhaustif estime que près de 70% des nations dans le monde sont considérées comme ayant un problème sérieux de vénalité parmi leurs fonctionnaires. Et aucun des 177 pays étudiés en 2013 n'obtient un score parfait. Ni les Etats Unis d’Amérique, ni la France, ni même pas les bons élèves de la classe comme le Danemark et la Nouvelle Zélande qui arrivent en tête des pays les moins touchés par la corruption ou encore la Finlande, la Norvège et la Suède qui ferment le top five du classement.

Pour se positionner dans les nations les moins vénales, et sans revenir aux questions de la culture et de l’éducation, il y a trois conditions sine qua non : un niveau de développement économique conséquent, une situation sociale équilibrée et une justice irréprochable. Il y a une relation dialectique entre ces trois axes mais chacun sait que la justice et les corps apparentés telle la police constituent le cocon douillet, bien fermé sur lui-même, dans lequel prospère le bakchich, les dessous-de-table et les enveloppes. Cela fait une éternité qu’on en parle au Maroc sans que cela ne conduise qu’à la perpétuation de toutes sortes de forfaitures. Tout se passe comme si la corruption adore que l’on parle d’elle. Plus on en parle plus elle se banalise. L’ETA MAROCAIN, OU UNE PARTIE DE L’ETAT MAROCAIN fait ce qu’elle peut pour circonscrire le mal, c’est de ça qu’il faut parler, son éradication étant impossible. Sachant que c’est en premier l’Etat qui est habité par ce haïssable phénix, amputé de la poésie du Phénix de la mythologie. Hydre lui sied mieux.

Il n’y a qu’à voir les précautions que prend la charte publiée après quatorze mois de dialogue national juste pour éviter de dire que tout n’est pas pourri dans la pire des pourritures pour comprendre combien le pas est hésitant. C’est de velours gantée que la charte arrive à dire « cependant [admirez le cependant] le système judiciaire demeure entaché de dysfonctionnements et de faiblesses se rapportant à l'indépendance de la justice, les mécanismes de moralisation, la protection des droits et libertés, l'efficacité et l'efficience de la justice, les capacités institutionnelles du système judiciaire et les méthodes de gestion du service de la justice. » Rien que ça ! La réforme de la justice, un échec ? Non un début. Un début d’échec comme un début de succès. Et ce serait mal venu dans ce cas de faire un mauvais procès au chef du gouvernement ou au ministre de la justice. Le mal les a précédés et leur succédera. Un jour on y arrivera, mais ce jour-là n’est pas demain ni le lendemain de la fin du mandat du gouvernement en place. Hélas !