Négociations israélo-palestiniennes: On tourne en rond
Mireille DUTEIL

John Kerry, l’impavide secrétaire d’Etat américain feint de croire que le dossier des négociations israélo-palestiniennes avance. Il est bien le seul. Concrètement la situation est totalement bloquée. Palestiniens et Israéliens, qui ne se sont pas rencontrés depuis l’automne dernier, campent sur leurs positions. Kerry va leur proposer un projet d’« accord-cadre » pour des négociations sur un futur statut final. Faute de mieux, les Américains semblent atteints du syndrome du « chasse-neige » en repoussant à des lendemains incertains le moment des négociations définitives.

Les pourparlers entamés en juillet 2013 pour neuf mois, vont-ils se poursuivre après le 30 avril ? « Oui », affirme John Kerry, qui dit avoir l’accord des deux camps. « Il n’en est pas question », nous a-t-on dit du côté palestinien, « les négociations ne mèneront à rien ». Dont acte. Même si on sait que les « promesses n’engagent que ceux qui les reçoivent » a dit un jour un ministre français.

Quelles sont actuellement les positions des uns et des autres ?

Première difficulté : l’exigence d’une reconnaissance d’Israël en tant qu’Etat juif. Elle est imposée par Benyamin Netanyahou. La sachant inacceptable pour les Palestiniens, il peut ainsi faire peser sur son adversaire la responsabilité de l’échec des pourparlers. Les Palestiniens estiment que ce choix relève de la seule responsabilité d’Israël qui ne l’a jamais évoqué lorsqu’il a signé des accords de paix avec l’Egypte et la Jordanie. Israël pourrait se prévaloir de cette reconnaissance pour renvoyer les Israéliens d’origine palestinienne (20% de la population), refuser l’idée même d’un retour éventuel de certains réfugiés palestiniens et justifier une narration uniquement juive de cette terre qui est aussi musulmane et chrétienne.

Deuxième dossier : Jérusalem. Les Israéliens ont annexé la Ville sainte, y compris dans sa partie Est, et n’évoquent plus cette « question classée ». Les Palestiniens veulent installer leur capitale à Jérusalem-Est et s’inquiètent des propositions américaines. Le projet de Kerry accepte l’idée d’une capitale palestinienne à Jérusalem-Est, mais les frontières de la ville ayant été étendues par Israël, il propose d’établir la capitale dans un quartier périphérique.

Troisième dossier : la Vallée du Jourdain. L’extrême droite israélienne veut l’annexer et Benyamin Netanyahou y laisser des militaires pendant 40 ans. Les Palestiniens acceptent une démilitarisation de la Palestine indépendante et la présence de forces de l’OTAN sur le Jourdain. Militaires et colons israéliens disposeraient de cinq ans pour quitter la région. Kerry propose dix ans.

Quatrième dossier : les réfugiés. Mahmoud Abbas veut que la diaspora palestinienne puisse décider de son sort, rester dans le pays d’accueil, s’installer dans la Palestine indépendante, retourner en Israël, partir dans un pays tiers. Les Palestiniens reconnaissent que ce choix offert aux Palestiniens de retourner en Israël peut être limité dans le temps et en nombre d’habitants.

Cinquième dossier : les frontières. Les Palestiniens veulent les frontières de 1967 mais acceptent des échanges de territoires, les Américains font la même proposition ; les Israéliens entendent annexer les grands blocs de colonies, soit 8% de la Cisjordanie et 75% des colons.

C’est le dossier le moins difficile, en supposant que la droite israélienne accepte l’Etat palestinien indépendant. Rien n’est moins sûr.

Accroche :

Les Américains semblent atteints du syndrome du « chasse-neige » en repoussant à des lendemains incertains le moment des négociations définitives.