Palestine : La déprime
Mireille DUTEIL

Les Palestiniens de Cisjordanie sont en pleine déprime. Le 22 janvier, les Israéliens vont très probablement donner un troisième mandat à Benyamin Netanyahou, le Premier ministre du Likoud allié à Avigdor Lieberman, ancien ministre des Affaires étrangères d’extrême droite, farouchement opposé à la création d’un Etat palestinien indépendant.

Les Palestiniens n’attendent rien de bon de cette élection israélienne. Ce n’est pas la seule raison de leur désespérance. L’Autorité palestinienne va mal. Mahmoud Abbas a perdu une partie de sa légitimité. Son mandat présidentiel est largement dépassé mais il ne veut pas organiser une élection présidentielle tant qu’elle ne peut pas se tenir sur tout le territoire palestinien, faute de réconciliation entre le Fatah et le Hamas.

En outre, non seulement le processus de paix est bloqué, mais les Palestiniens craignent d’être abandonnés de tous. Des Etats-Unis d’abord. Barack Obama n’a pas encore annoncé s’il comptait mettre le dossier israélo-palestinien en tête de ses préoccupations pendant son second mandat. Ramallah compte beaucoup sur le nouveau Secrétaire d’Etat, John Kerry. Concrètement, en 2012, Washington n’a pas versé sa contribution annuelle de 200 millions de dollars à l’Autorité palestinienne. Le Congrés interdit à l’administration Obama de financer l’AP depuis l’admission de la Palestine à l’ONU comme Etat observateur non membre. Pire, aujourd’hui, Washington demande aux Palestiniens de renoncer à faire de Jérusalem, leur capitale, et au principe du retour des réfugiés, s’ils veulent recevoir une aide financière. « Un chantage inadmissible », répliquent les autorités palestiniennes.

Or, l’Autorité palestinienne est en quasi faillite. Les fonctionnaires n’ont touché que la moitié de leur salaire de novembre. Les grèves se multiplient. La fonction publique est en arrêt de travail trois jours par semaine ; le pays est bloqué. L’Etat ne paie plus les entreprises privées, les banques ne veulent plus lui prêter d’argent et le déficit budgétaire atteint 1,3 milliard de dollars en 2012 (sur un budget de 3,6 milliards).

Impossible de combler le déficit puisque les donateurs étrangers n’ont versé que 820 millions de dollars en 2012. Il manque 500 millions de dollars. Depuis 2009, la chute de l’aide extérieure est vertigineuse ( elle était de 1,8 milliard de dollars en 2008). Et le gouvernement ne sait jamais en début d’année, sur quel montant financier il peut compter. Pas facile de faire un budget en Palestine. La frilosité existe aussi chez les Etats arabes. En novembre, lors d’une réunion de la Ligue arabe, ils ont promis de verser 100 millions de dollars par mois à l’Autorité, un « filet de sécurité ». Pas un centime n’a été payé. Le Qatar ne donne plus rien depuis plusieurs années réservant son aide au Hamas à Gaza. L’Arabie Saoudite verse une obole de 100 millions de dollars, une goutte d’eau pour un royaume dont l’excédent budgétaire 2012 a atteint 78 milliards de dollars. Seule l’Algérie et l’Union européenne, tiennent régulièrement leurs promesses financières. Quant à Israël, il n’a pas reversé en décembre les taxes perçues au nom des Palestiniens. Problèmes économiques et financiers, effondrement administratif, rien ne va plus en Cisjordanie. Cerise sur le gâteau : les colons se font de plus en plus agressifs, arrachent des oliviers et « taggent » les mosquées en toute impunité. L’armée israélienne, de son côté, multiplie les incursions pour arrêter des militants palestiniens. L’atmosphère est mauvaise. Un cocktail explosif. заказать рекламу сайта