Escroquerie à la mendicité. On croyait qu’elle avait un bébé. C’était une poupée.
Les bébés sont loués à 150 dhs la journée

Les mendiants redoublent d’ingéniosité pour susciter la pitié et gagner plus. A Casablanca, la police vient d’arrêter une femme qui mendie avec une poupée aux bras en la faisant passer pour un bébé.



Tous les moyens sont bons pour toucher les cœurs et provoquer la générosité des passants. Un bébé au bras, cette femme faisaient le tour des feux rouges casablancais, pour demander l’aumône. Prétendant être une réfugiée issue d’un pays arabe en détresse, elle brandissait son petit comme un atout convainquant et demande l’argent pour son lait et ses médicaments...Sauf que les agents de police vont découvrir que ce n’est qu’une poupée. Pire encore, c’est une marocaine qui se cachait derrière cette identité usurpée pour attendrir les passants et gagner plus.

Arrêtée en flagrant délit sur la voie publique, elle avait en sa possession des copies de papiers et de pièce d’identité d’une autre personne étrangère, en plus d’une belle somme, recette de son activité illégale. En garde à vue actuellement, les interrogatoires avec cette femme révèleront d’autres détails sur cette énième affaire de mendicité professionnelle.

Ne lui donnez rien !



Rappelons que récemment, a été lancée par la société civile une campagne de sensibilisation contre la mendicité et l’exploitation des enfants par des adultes. Un phénomène social en pleine expansion et une activité illégale tentaculaire. #pour_son_bien_ne_lui_donne_rien, #sa_place_est_en_classe est d’ailleurs le message central de cette campagne lancée par l’association Jood. « En croyant aider ces enfants en donnant des pièces, on les enfonce plus encore dans leur misère. Pire, on contribue à leur exploitation par des adultes », met en garde Hind Lâaydi, présidente de Jood.

Selon les statistiques du HCP datant de 2007, un Marocain sur 150 est mendiant. Leur nombre s’élèverait à quelques 200.000 dont plus de 62,4% sont des professionnels. « Ce sont de vieux chiffres. Je vous laisse imaginer l’ampleur du phénomène actuellement », commente Lâaydi. En 2015, l’Unicef fait état de quelques 25 .000 enfants vivant dans la rue, dont une grande partie vit de mendicité. En 2016, la DGSN a arrêté 2890 mendiants professionnels, dont 1177 mineurs. Dans le bilan 2020 du plan d’action relatif à la protection de l’enfance contre l’exploitation dans la mendicité, le ministère de la solidarité, du développement social, de l’égalité et de la famille et le parquet général affirment avoir sauvé 142 enfants (79 filles et 63 garçons) de cet enfer, rien que dans la région de Rabat, Salé et Kénitra.

Trafic



Pratiquée principalement par des mères en situation difficile, une bonne partie des victimes d’exploitation sont des bébés ou des enfants en bas âge. « Ainsi les deux tiers des enfants victimes sont âgés de 0 à 4 ans, sachant que 27% parmi cette catégorie ont moins d’une année » explique Jamila El Moussali, ministre de la solidarité, du développement social, de l’égalité et de la famille en présentant son bilan. Utilisés par leurs propres mères dans ce trafic inhumain, « ces bébés sont endormis à l’aide de somnifères, ils ne sont pas nourris durant toute la journée et encore moins changé pour qu’elles puissent s’adonner à leur besogne sans dérangement » décrit l’actrice associative.

Maltraités, ces enfants sont même loués à d’autres mendiants pour 150 dhs. « Elles gagnent jusqu’à 350 dhs par jour, le vendredi ça atteint les 800 dhs. Comment voulez-vous convaincre ces femmes d’aller travailler lorsqu’elles gagnent autant d’argent rien qu’en mendiant ? », s’interroge Lâaydi sur une vidéo de sensibilisation diffusée sur la page de l’association et sur Youtube.

« Pire encore, cet enfant apprend dès son jeune âge à mendier. En tuant sa dignité dans l’œuf, on en fait un futur mendiant professionnel et parfois même un exploitant d’autres enfants », dénonce-t-on auprès de Jood.

« SVP ne donnez plus d'argent aux enfants mendiants ni aux adultes qui exhibent des enfants pour vous émouvoir et vous inciter à donner ! », implore Hind Lâaydi. « Nous sommes convaincus que le seul moyen d'arrêter l'exploitation de ces enfants et de leur laisser une chance de partir à l'école dépend de nous tous. Arrêtez donc de contribuez à leur perte en finançant leurs exploitants ! », appelle-t-on à Jood.

Délit



Considérée comme un délit par le code pénal marocain, la mendicité est réprimandée par l’article 326. Ce dernier stipule qu’il est puni d'emprisonnement d'un à six mois, quiconque ayant des moyens de subsistance ou étant en mesure de se les procurer par le travail ou de toute autre manière licite, se livre habituellement à la mendicité en quelque lieu que ce soit. L’utilisation d'enfants, autres que leurs propres descendants, par des mendiants pour solliciter la charité est punie d'une peine d'emprisonnement de 3 mois à 1 an. Cette peine s'applique aussi aux mendiants invalides ou dénués de ressources. La peine est doublée (6 mois à 2 ans) si une personne ayant autorité sur un enfant ( père ou mère,...) ou en ayant la garde, le livre même gratuitement, à des vagabonds ou à des individus faisant métier de la mendicité, si cet enfant est âgé de moins de 13 ans.