Faut-il continuer à choyer les transporteurs?

Les entreprises du transport routier de marchandises pour compte d'autrui ont été intégrées dans les catégories bénéficiant du soutien exceptionnel des professionnels du secteur du transport routier, a déclaré le ministre des transports au Parlement. Un lobby qui peut tout obtenir du gouvernement.

Selon le ministre des Transports Mohammed Abdeljalil, 3 milliards de dirhams ont été distribués à 31.000 entreprises exploitant près de 71.000 camions.

Il faudra ajouter à ce montant les 250 millions de dirhams consacrés au programme de renouvellement du parc du transport routier qui a servi jusqu’à maintenant 683 subventions pour un coût d'environ 95 millions de dirhams (600 subventions sont en cours de versement).

Par ailleurs, le programme de formation des chauffeurs professionnels qui a coûté 100 millions de dirhams au titre de 2022 a bénéficié à 60.000 chauffeurs professionnels. 40.000 autre en bénéficieront en 2023.

Nous avons donc un total de 3,350 milliards de dirhams consacrés aux transporteurs.

Et pourtant, il y a toujours des camions de plusieurs décennies d’âge qui sillonnent les routes et surtout les boulevards des grandes villes, qui stationnent partout où cela plait aux chauffeurs, y compris dans les zones résidentielles. Et qui en plus choisissent les heures de pointe pour sortir du port créant une belle pagaille, sous les yeux des policiers impuissants. Le lobby des transporteurs est si puissant que personne, ni maire, ni gouverneur, ni wali ne peut imposer une réglementation stricte.

Une des raisons avancées pour expliquer les subventions aux transporteurs était la lutte contre l’inflation. Le renchérissement du prix du carburant allait affecter tous les produits puisque le transport est un poste important du coût.

On s’est aperçu par la suite que le contribuable paie des subventions et subit en même temps les effets d’une augmentation des prix généralisée.

Ces 3,350 milliards de dirhams auraient-ils pu être employés de manière plus rationnelle? Certainement. Economiquement, rien ne justifie des subventions aux transporteurs. Au contraire, il fallait laisser le secteur se réguler de lui-même et se débarrasser des entreprises défaillantes.

Cela aurait pu également conduire à des regroupements et à la création de grandes entreprises aux normes. L’aide ne fait que perpétuer un parc délabré et des entreprises ne respectant aucune loi ni aucune règle. C’est l’anarchie totale. En plus, c’est la porte ouverte à la corruption.

Quand on voit un camion qui aurait dû être envoyé à la casse circuler, on se de demande comment il a pu échapper au contrôle technique et aux nombreux contrôles de la police, de la gendarmerie et du ministère des Transports.

En plus, personne ne se soucie des conditions de travail des chauffeurs, sous payés et parfois sans droits sociaux.

Curieusement, les partis de l’opposition ne discutent pas ce sujet comme si tout se passait très bien. Mais là on entre dans un autre labyrinthe.