Loi sur la grève. Ce que recommande le CESE
Le conseil économique, social et environnemental critique le projet de loi organique n° 97.15 sur le droit de grève.

Le CESE critique le projet de loi n° 97.15 sur le droit de grève, dénonçant sa structure incohérente et des exclusions. Il recommande une révision pour garantir un cadre clair et équilibré, respectant les droits constitutionnels et renforçant le dialogue social.

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a été saisi par le président de la chambre des représentants pour évaluer le projet de loi organique n° 97.15, visant à organiser le droit de grève au Maroc. Ce projet, bien qu'attendu depuis plus de 60 ans, suscite des interrogations sur sa structure, son contenu et ses implications.Une évaluation critiqueLe CESE souligne que le projet présente une structure incohérente, rendant sa lecture difficile. La combinaison de nombreux articles, souvent mal définis, nuit à la clarté et à la sécurité juridique. En outre, certaines catégories professionnelles se trouvent exclues, ce qui constitue une violation du droit constitutionnel, reconnu par toutes les constitutions du Royaume depuis 1962 et par des normes internationales, telles que le Pacte international relatif aux droits économiques et sociaux de 1966.Le Conseil note également une lourdeur excessive en termes de détails et de procédures, suggérant que de nombreux articles seraient plus appropriés dans des textes distincts ou des règlements. Cela va à l'encontre de l'esprit d'un droit constitutionnel, attendu avec impatience.Sur le plan de la forme, le CESE a noté un manque de clarté dans le projet de loi concernant les implications économiques et sociales de la régulation du droit de grève. De plus, le texte ne précise pas suffisamment son esprit ni ses objectifs. Sur le fond, il a suggéré d’inclure des principes de base qui garantissent un cadre équilibré et progressif pour l’exercice du droit de grève.Déséquilibres dans la réglementationSelon le CESE, le projet de loi présente un déséquilibre évident, avec seulement 22 articles sur 49 consacrés au secteur privé, tandis que 4 articles s'adressent aux établissements publics. En outre, une approche répressive prédomine, avec 12 articles consacrés aux sanctions, ce qui peut nuire à l'initiative des travailleurs. Le conseil a également soulevé des préoccupations quant aux critères de représentation des syndicats dans le secteur public et privé. L'article 3 du projet de loi limite l'appel à la régulation aux syndicats, excluant d'autres catégories professionnelles. Cela soulève des questions sur la représentativité et la légitimité des syndicats dans ce contexte.Durées excessives et conditions de la grèveLes délais imposés pour déclencher une grève, comme le délai de 30 jours après notification des revendications, sont jugés trop longs et peuvent constituer une restriction excessive au droit de grève. Le Conseil recommande que ces délais soient le fruit d'accords entre les parties concernées, tenant compte des spécificités de chaque secteur. Le Conseil appelle également à éviter les sanctions privatives de liberté dans le cadre de ce projet de loi, en insistant sur la nécessité de clarifier les formes d'intervention lors des grèves pacifiques. Il est primordial de s'assurer que les pratiques répressives ne nuisent pas à l'exercice du droit de grève.Recommandations pharesLe conseil souligne la nécessité d'établir des conditions claires pour l'exercice du droit de grève, conformément à l'article 29 de la constitution et à l'article 86, qui exigent une soumission des textes réglementaires au parlement. Il préconise une révision du projet de loi pour encadrer le droit de grève dans un cadre réglementaire, respectant les droits civils, politiques, économiques et sociaux. Il suggère aussi de s'inspirer des normes internationales, notamment des directives de l'Organisation internationale du travail, pour reconnaître le rôle du droit de grève dans la société marocaine en favorisant le dialogue social avec l’implication de toutes les parties prenantes, assurant que la loi reflète les intérêts de l'ensemble de la société.De plus, il est recommandé d’équilibrer les droits de la liberté syndicale et de la liberté de travail, tout en répondant aux exigences des entreprises pour une meilleure productivité.Le Conseil insiste sur l'importance d'une clarté juridique et appelle au renforcement du dialogue social et des mécanismes de médiation, tout en harmonisant les relations de travail avec les dispositions du Code du travail.