Casablanca, une fermeture pas sans dégâts

Casablanca est mise en quatorzaine. La décision n’est pas au goût de beaucoup de professionnels de divers secteurs. Les casablancais sont aussi contrariés.

Mounia Kabiri Kettani 

Dimanche 6 septembre à 22 heures. Le gouvernement décide de fermer les accès et les sorties de la capitale économique du Royaume. Les commerces sont obligés de baisser leurs rideaux à 15 heures, les cafetiers sont contraints de fermer leurs portes à 20 heures et les restaurateurs à 21 heures. L’entrée en vigueur des nouvelles restrictions est prévue pour le lendemain lundi 7 septembre à midi. La raison ? Une reprise active du virus Covid-19 dans la métropole. Et le gouvernement a pris cette décision pour tenter de limiter la propagation du virus. Sauf que cela n’a pas plu à de nombreux professionnels dont les cafetiers et restaurateurs.

Cafetiers inquiets

Déjà impactés lourdement par cette crise sanitaire, pour eux la décision du dimanche tombe comme un couperet. «De telles décisions importantes ne doivent pas se prendre à la dernière minute sans aucune considération pour les spécificités de notre secteur », s’insurge, le président de l’association nationale des cafés et restaurants au Maroc (ANPCRM). Noureddine Harrak ajoute que «généralement, nous cafetiers et restaurateurs, nous faisons notre stock de marchandises une fois par semaine. Et ce sont pour la plupart des provisions de produits périssables qu’on doit jeter finalement. Une double peine pour des professionnels déjà en crise ».

Avant la décision du gouvernement, l’heure de fermeture était fixée à 23 heures. Si pour certains 2 heures ou 3 heures ne changera pas grand chose, pour les un secteur comme celui des cafés et restaurants c’est une perte conséquente. «Lors de cette période d’été, nous réalisons 70% de notre chiffre d’affaires le soir. Après le confinement, la reprise était très lente et il nous a fallu deux mois pour récupérer près de 40% de notre clientèle. Nos recettes journalières sont déjà très faibles et ne nous permettent même pas de couvrir nos charges. Pour nous cette décision est le coup de grâce », déclare  Noureddine Harrak qui déplore par la même occasion l’absence de mesures ou même de dialogue avec les pouvoirs publics pour trouver des issus pour un secteur qui compte près de 200.000 cafés et restaurants au niveau national et emploie plus de 1,5 millions de salariés.

Casablancais angoissés

Au-delà des cafetiers et restaurateurs, la décision a fini de miner aussi le moral des casablancais, qui affectionnent la vie nocturne, Ils ne peuvent plus fréquenter leur restaurant préféré à partir de 21 heures. Ni même faire un tour à la corniche à partir de 22 heures. Le couvre feu est prévue à cette heure même. «La situation semble bien critique à Casablanca certes avec ces chiffres qui explosent. Mais ce n’est pas de notre faute non plus. Confinement, pas de voyages, pas de vacances d’été et maintenant nous sommes obligés d’être chez nous à 22 heures, faire nos courses avant 20 heures, trouver des solutions pour nos enfants avec cet enseignement à distance…on se sent déboussolés. C’est l’angoisse totale », nous confie cette jeune casablancaise, cadre chez une multinationale et maman de deux enfants. Pour ceux contraints de quitter la ville pour des raisons médicales et professionnelles, c’est la catastrophe totale. «Cela fait deux jours que je laisse tout et vient attendre le « pacha » pour qu’il me signe l’autorisation de déplacement qui me permettra de me rendre à Rabat pour des contrôles médicaux. Je ne l’ai pas encore reçu pour des raisons que je ne comprends pas », nous raconte ce quadragénaire qui, muni de son dossier médical, attend toujours le feu vert du pacha devant l’arrondissement de Hay Hassani.

Ministère de la santé engagé

Pour que Casablanca se remette plus rapidement sur pieds, le ministre de la santé , Khalid Ait Taleb promet la mobilisation d’un soutien logistique, renforcé par un appui en matière de ressources humaines avec une augmentation de la capacité des services de réanimations. L’annonce a été faite au terme d’une réunion technique avec le ministre de l’industrie, du commerce, de l’économie verte et numérique, Moulay Hafid Elalamy, et le wali de la région Casablanca–Settat, gouverneur de la préfecture de Casablanca, Said Ahmidouch. « Casablanca a connu, récemment, une croissance importante des cas positifs, ce qui a nécessité de passer à une vitesse supérieure en matière de lutte contre la Covid-19 », souligne Ait Taleb, ajoutant que les mesures drastiques mises en place permettront d’évaluer la situation durant les 14 prochains jours dans la perspective d’inverser cette tendance croissante.