Entretien avec Tariq Sijilmassi : « La productivité c'est bien, mais les aspects sociaux sont également très importants ».
Tariq Sijilmassi nPru00e9sident du Directoire de cru00e9dit Agricole du Maroc

L’Observateur du Maroc. Quel est l’objet du Forum de l’investissement dans la filière oléicole ?

Tariq Sijilmassi. C'est un forum dont l'objectif est de renforcer l’intérêt du Crédit Agricole du Maroc pour le financement de la filière oléicole. Nous avons ressenti que cet intérêt avait besoin d'être re-boosté. Je pense que cet objectif est atteint vu le nombre important des participants. L'idée est de promouvoir l'investissement de l'amont à l'aval, depuis la plantation du petit agriculteur jusqu'au grand investisseur et au raffineur, en passant bien évidemment par toutes les autres phases du processus : la trituration, traditionnelle ou moderne, notamment... Il s’agit également de promouvoir un Label Maroc à l'international pour que la commercialisation suive.

Comment remédier au problème de la productivité surtout des petites exploitations agricoles ?

La productivité est une problématique d'abord de recherche. Il faut installer les bonnes cultures. C'est aussi une problématique d'objectifs. Lorsque vous êtes dans une vision d'intégration et de compétitivité sur les marchés mondiaux, la productivité entre en jeu. Elle devient cruciale pour pouvoir avoir un prix compétitif au niveau international. Néanmoins, dans beaucoup de cas il faut comparer le comparable. Par exemple, le programme Millenium Challenge Account ainsi que les autres programmes promus par le ministère de l'Agriculture visent la reconversion des productions non rentables, essentiellement les céréales dans les zones inadaptées. Je suis pour la production céréalière, mais là où c’est le plus adéquat. Les zones de piment montagneux qui ne sont pas adaptées aux céréales doivent être reconverties dans l’arboriculture, comme l'olivier. Dans ces cas là, ce n'est pas seulement la productivité qui entre en ligne de compte, c'est l’élévation en général du niveau de vie de ces petits agriculteurs. Il ne faut pas toujours voir les choses du côté de la productivité et de la compétitivité. C'est valable lorsque vous êtes dans une grande industrie et que vous partez à l'international, mais lorsque vous êtes dans un changement radical pour transformer le mode de travail d’un agriculteur dont la production ne dépasse pas 4 à 5 quintaux de céréales en producteur disposant d’un ou 2 hectares d'oliviers, le sacrifice est tout à fait payant. Au Maroc, il faut bien faire attention. La productivité c'est bien, mais les aspects sociaux sont également très importants. Il faut toujours faire la part des choses entre les cultures qui sont à faible rendement et les cultures qui sont quand même meilleures, plus adaptées à leur environnement. Dans le cas du piment montagneux, les cultures ne sont pas très intensives. Elles sont de l’ordre de 50 à 60 arbres à l'hectare, alors que vous trouvez parfois, à côté, dans des exploitations très modernes, jusqu'à 1000 arbres à l'hectare. Mais bien entendu, l’un n’exclut pas l'autre. Comme et il faut de tout pour faire un monde, il faut de tout pour faire une agriculture.

Vous avez signé une convention de partenariat avec l’ANIMA. Est-ce que vous avez senti un recul en matière de mécanisation ?

Non, on n’a senti aucun recul. Il y a d’ailleurs très peu de statistiques sur le sujet. En tout cas, le taux de mécanisation au Maroc n'a pas atteint les objectifs recherchés. Il est donc nécessaire et impératif que le Crédit Agricole, en tant que principal financeur du monde rural marocain, donne un coup de pousse à la mécanisation. On le fera à travers cette convention. C’est, en fait, une ancienne convention qui est remise à niveau avec des taux avantageux. Elle va permettre à toutes les personnes qui souhaitent s’équiper en matériel et en machines agricoles de pouvoir le faire. Et nous allons lancer, dans les semaines à venir, une campagne de promotion de cette convention pour encourager les agriculteurs à acheter du matériel, des machines et des outils, de préférence avec notre concours.

Paru dans L’Observateur du Maroc n°213 сео оптимизация цена