Tourisme. Le Maroc a besoin de plus de femmes guides
Zina Bencheikh, directrice générale Europe, Moyen-Orient et Afrique d'Intrepid Travel et Hala Benkhaldoun, directrice générale de l'agence au Maroc.

Dans le tourisme mondial, le marché du « women only » connait une forte croissance. Au Maroc aussi. Le concept séduit. Seulement, pour ce marché de niche en particulier, le nombre de guides femmes reste bien en-deçà des espérances. La volonté est de changer la donne.

Au Maroc, 54 % des travailleurs du secteur du tourisme sont des femmes, contre 39 % dans l'ensemble de l'économie. Le constat reste cependant alarmant : Les femmes dans le tourisme ont tendance à occuper les emplois les plus bas et non rémunérés. Pour certains métiers, l’accès est encore plus réservé aux hommes comme c’est le cas pour la profession de guide touristique, où sur un total de 3.000 professionnels, seules 4% sont des femmes.

Obstacles à lever

Les raisons sont multiples. Zina Bencheikh, directrice générale Europe, Moyen-Orient et Afrique d’Intrepid Travel, pointe du doigt deux problématiques majeures. La première est liée au manque de visibilité sur le métier et la seconde porte sur la difficulté d’accès suite aux contraintes règlementaires. «Le concours organisé par le ministère du tourisme est une opportunité pour régulariser la situation des guides et surtout avoir plus de femmes dans le métier, jusque là réservé aux hommes. Mais, ce concours n’est pas régulier », explique Bencheikh ajoutant que la solution serait plutôt de renforcer le nombre de formations pour un accès plus facile au métier.

Dans la région Maghreb et Moyen Orient, la situation est très disparate. «En Egypte par exemple, considéré comme le premier concurrent du Maroc dans la région, le métier de guide est accessible via des études universitaires. Des centaines de guides sont diplômés chaque année dont beaucoup de femmes », fait savoir Bencheikh.



Un marché de niche réservé aux femmes

De son côté, Hala Benkhaldoun, directrice générale d’Intrepid Travel au Maroc note que pour les femmes, le métier de guide est non seulement valorisant mais est source aussi d’une certaine autonomie et indépendance financière. Le salaire moyen des guides en effet est estimé entre 500 et 1.500 DH par jour sans parler des pourboires et primes. «Cela pourrait intéresser beaucoup de femmes », tient à souligner Benkhaldoun.

Sur le marché, Benkhaldoun insiste que la demande pour les guides femmes est très forte surtout avec l’émergence d’un tourisme de niche réservé aux femmes. « En 2018, nous constaté qu’il y avait de plus en plus de femmes qui désirent voyager entre elles, en groupe. Ainsi, le « women only », est un segment qui connait une croissance fulgurante. Chez Intrepid travel, nous avons lancé un produit dédié « Women expedition ». Le succès a été immédiat avec un taux de croissance qui a dépassé les 300% l’année dernière », souligne Benkhaldoun.

Selon elle, la demande émane principalement de la part de clients en provenance d’Australie (35%), de Canada et Etats Unis (35%) et de l’Angleterre (30%). Seul hic : le développement de ce genre de produit nécessite d’avoir plus de femmes guides. «Sur un total de 20.000 voyageurs, 70% de notre clientèle sont des femmes. Mais, le nombre de guides femmes malheureusement ne dépasse pas 15 contre 105 hommes », déplore la directrice générale d’Intrepid Travel au Maroc qui assure que pour atteindre les objectifs de l’agence en 2026 fixés à 50.000 voyageurs, ce nombre de guides femmes reste très insuffisant. La volonté est alors de non seulement doubler le nombre de guides femmes chez l’agence mais de contribuer aussi à l’amélioration de la représentativité des femmes dans ce métier et d’atteindre même la parité dans les années à venir.