Marché du travail. Les hommes mieux rémunérés que les femmes.
En moyenne, les hommes perçoivent un salaire mensuel de 3 900 DH, contre 3 700 DH pour les femmes.

L’inégalité hommes-femmes au Maroc reste une réalité ancrée, alimentée par des facteurs structurels et culturels. Les données du HCP le prouve. La nécessité d'investir dans des politiques visant à éliminer la discrimination sexiste et à promouvoir l'égalité des chances sur le marché du travail demeure une nécessité.

A l'occasion de la journée internationale des droits des femmes 2024, placée sous le thème "Investir en faveur des femmes : accélérer le rythme", le Haut-Commissariat au Plan apporte un éclairage sur la situation des femmes au Maroc, se concentrant sur les inégalités salariales de genre et le rôle de la discrimination sexiste.

Les inégalités salariales entre hommes et femmes, mesurées par l'écart de rémunération, sont liées à divers attributs individuels tels que l'éducation, l'expérience professionnelle et la catégorie socioprofessionnelle. La discrimination sexiste joue également un rôle crucial, où, à qualification égale, les femmes perçoivent en moyenne un salaire inférieur à celui des hommes.

Une parité inégale sur le marché de travail

En 2019, la proportion de femmes parmi les salariés urbains âgés de 18 à 60 ans est de 32,2%, reflétant une parité inégale sur le marché du travail. Cet écart se traduit, selon le HCP, par un indice de parité de 2,1. Autrement dit, parmi 31 salariés, 10 sont des femmes et 21 sont des hommes. Cette parité sur le marché du travail fluctue nettement avec l’avancement en âge, passant de 1,8 pour la tranche d’âge 18-29 ans à 2,4 pour les 30-44 ans pour se fixer à 2,1 pour les 45-60 ans. « La sous-représentativité des femmes parmi les salariés est le reflet de leur faible participation à la vie active. Non seulement le taux d’activité des femmes demeure nettement inférieur à celui des hommes, mais il continue de décliner au fil des années, passant de 30,4% en 1999 à 21,5% en 2019 », révèle le HCP.

De plus, le chômage de longue durée, douze mois et plus, touche les femmes chômeuses plus que leurs pairs hommes, avec des proportions respectives de 76,3% et 63,8%, en raison notamment de la contraction de l’offre d’emploi et son corollaire, l’aggravation du chômage en milieu urbain.

L’examen de la relation genre-salariat-profession révèle également des différences de parité bien établies selon les groupes de profession. En effet, les hommes sont nettement plus représentés que les femmes parmi les « Cadres supérieurs et responsables hiérarchiques », avec un indice de parité de 1,7, ainsi que parmi les « Cadres moyens et employés » (1,5). Cette ségrégation professionnelle est encore plus marquée parmi les « Artisans et ouvriers qualifiés », avec un indice de parité de 3,4, et parmi les « Manœuvres non agricoles », avec un indice de 2,0.

Un écart salarial important

Selon les données du HCP, en 2019, le salaire mensuel moyen s’élève à 3 800 DH par salarié au niveau national. En moyenne, les hommes perçoivent un salaire mensuel de 3 900 DH, contre 3 700 DH pour les femmes.

Par rapport à la population salariée urbaine âgée de 18 à 60 ans, le salaire moyen des hommes s’élève à 4 900 DH, ce qui représente une augmentation de 23 % par rapport au salaire moyen des femmes, établi à 3 900 DH. En termes de salaire médian, évalué à 3 400 DH pour les hommes, contre 2 800 DH pour les femmes, cet écart est de 20% en faveur des hommes.

Par groupe d’âge, l'écart du salaire moyen suit une tendance en forme de U inversé, avec une période où les femmes âgées de 18 à 29 ans gagnent un salaire moyen supérieur de 10 % à celui de leurs homologues masculins. Cependant, au-delà de cette tranche d'âge, l'écart salarial se creuse, montrant un désavantage en faveur des femmes. Il atteint son niveau le plus marqué, avec un écart de 41,4 %, chez les salariés âgés de 30 à 44 ans. Malgré une atténuation de cet écart pour les salariés âgés de 45 à 60 ans, il persiste toujours en faveur des hommes et se maintient à des niveaux élevés, approchant la moyenne globale de l'écart salarial, quelle que soit la tranche d'âge.

Appréhendé par niveau scolaire, l’écart salarial, en faveur des hommes, atteint son niveau le plus élevé (42,4%) parmi les salariés sans niveau scolaire. Cependant, cet écart se réduit à 30% parmi les salariés ayant suivi une formation scolaire fondamentale et se fixe à 37% parmi ceux ayant atteint un niveau d'éducation supérieur. Sans surprise, l’étendue de l’écart salarial parmi ces derniers provient principalement des écarts salariaux hommes-femmes dans le secteur privé qui s’élèvent à 82%, contre 13% dans le secteur public. En d’autres termes, le salariat dans le secteur privé contribue à hauteur de 79% à l’écart salarial entre les hommes et les femmes ayant poursuivi des études supérieures.

Par ailleurs, dans le secteur public, avec un salaire moyen de 8 500 DH pour les hommes et 8 300 DH pour les femmes, le gap salarial se limite à 2,4%. Dans le secteur privé, ces moyennes sont respectivement de 5 400 DH et 3 800 DH, soit un gap de 43%.

L’écart se creuse selon les catégories professionnelles

Les différences de salaire sont fortement influencées par la catégorie socioprofessionnelle, révélant des disparités marquées tout au long de la carrière. Initialement modérée, la disparité varie de 4% à 9% dans les premières années, touchant les "Responsables hiérarchiques, professions libérales et cadres supérieurs" ainsi que les "Cadres moyens et employés". Toutefois, avec l'avancée en âge, cette disparité s'accentue notablement. Globalement, l'écart salarial se creuse significativement, atteignant 38,1% pour la catégorie des responsables hiérarchiques et cadres supérieurs, où les hommes perçoivent en moyenne 12 400 DH contre 9 000 DH pour les femmes et 38,4% pour la catégorie des cadres moyens et employés, avec un salaire moyen de 5 000 DH pour les hommes, comparé à 3 600 DH pour les femmes. Il est estimé à 30% pour les manœuvres non agricoles et 11% pour les artisans et ouvriers qualifiés.

Discrimination sexiste

Le HCP note que l’écart salarial hommes-femmes, estimé à partir d’un modèle de formation des salaires, s’élève à près de 22%. Cet écart provient à hauteur de 91% de la discrimination sexiste. Le reste, près de 9%, s’explique par les différences entre les caractéristiques individuelles des femmes et des hommes. Cette discrimination sexiste est répartie presque également entre l'« avantage masculin », qui compte pour 46 % de l'écart salarial, et le « désavantage féminin », qui en contribue à hauteur de 45 %. Au total, cela signifie que les présupposés « valorisation des caractéristiques masculines » et « dévalorisation des caractéristiques féminines » dans le milieu professionnel sont tous deux des facteurs importants dans la perpétuation de l'écart salarial entre les deux sexes.

Analysée par classes de salaires, la discrimination sexiste est plus éminente dans le bas de l’échelle salariale. Elle explique 93% de l’écart salarial parmi les 60% des salariés les moins bien rémunérés, avec une contribution de 45,7% pour l’« avantage masculin » et de 47,3% pour le « désavantage féminin ». Par rapport aux 40% des salariés les plus bien rémunérés, 79% de l’écart salarial hommes-femmes est dû à la discrimination sexiste, 25,2% à l’« avantage masculin » et 53,9% au « désavantage féminin ».